Vue depuis Les Damps du haut sur le lieu de l'ancien débarcadère du bac où se trouvait la Maison rouge. L'orientation du chemin qui la suit montre clairement qu'il existait une voie reliant Alizay et Les Damps.
La "Maison rouge" est le nom d'une parcelle de la commune d'Alizay où se trouvent des industries comme Ashland et Double A. Quelle était cette maison rouge ?
Des parchemins conservés aux archives de la mairie des Damps nous apprennent l’existence d’un bac entre le village des Damps et la rive droite de la Seine, au nord. Mais où se trouvait le débarcadère de ce bac ? La réponse est assez simple : la place du village des Damps était située en face du confluent entre l'Eure et la Seine. De l'autre côté de la Seine se trouve le château de Rouville. Plus précisément, une route conduit de la berge nord de la Seine au village d'Alizay. Elle aboutit, de nos jours, au niveau du rondpoint de la déviation d'Alizay, en face de l'entrée du château de Rouville.
Or, ce bac ne reliait pas Les Damps à une rive droite inhabitée. D’anciennes chartes[1] nous apprennent que ce bac menait à une "hôtellerie", appelée La Maison rouge. Elle devait tirer son nom de la couleur de ses tuiles. Cette hôtellerie appartenait au seigneur de Rouville.
Sur cette carte d'état major datant de la moitié du XIXe siècle se voit un enclos avec plusieurs bâtiments au nord de la Seine, entre Les Damps et Alizay. Cet enclos représente l'ancienne hôtellerie fluviale de la Maison rouge ou le chanvre était aussi cultivé et chargé sur la Seine.
Cette hôtellerie devait principalement accueillir des mariniers, des haleurs et des voyageurs qui empruntaient le cours de la Seine. Pourquoi stationner ici ? La Maison rouge était entre deux obstacles pour la navigation fluviale :
- le pertuis[2] de Poses nécessitait une journée de travail pour faire passer une embarcation chargée. C’est pourquoi les haltes nocturnes étaient souvent nécessaires aux voyageurs avant et après le franchissement de cette difficulté naturelle ;
- le pont de Pont-de-l'Arche prenait lui aussi beaucoup de temps. Nous le relatons dans un article sur le montage des bateaux sous le pont.
Il n'est pas étonnant que des voyageurs fussent bloqués par la nuit entre Pont-de-l'Arche et Poses de ce côté-ci de la berge. Pourquoi de ce côté-ci ? Parce que l'autre rive était plus entrecoupée par des iles et donc par des berges mouvantes et impropres au halage. Elles nécessitaient plus souvent de faire franchir aux chevaux des bras de Seine sur des bacs précaires et payants.
La Maison rouge dût assurément être aussi une ferme dévolue à la culture et peut-être à l'élevage. La parcelle la plus proche de la Maison rouge se nomme "Le port au chanvre". Cette plante servait à la confection de tissus rudimentaires. Elle était cultivée dans la plaine alluviale d'Alizay et a peut-être occupé des travailleurs de la Maison rouge.
Carte postale des années 1910 située du côté du port au Chanvre, voire de la Maison rouge. L'espace a, semble-t-il, été déserté par les hommes, hormis quelques paisibles passages comme ici un pâtre, son chien (en bas à droite) et son troupeau.
[1] Dictionnaire Historique de toutes les Communes de l’Eure, Charpillon L.E., Caresme A.
[2] C’est à dire une perte d’altitude de la Seine à cet endroit qui accroit le courant et qui fait tourbillonner les eaux, rendant ainsi hasardeuse la navigation.
Armand Launay
Pont-de-l'Arche ma ville
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