Oui, et si c’était vous qui faisiez découvrir l’abbaye de Bonport ? Après une balade dans le centre ville de
Pont-de-l’Arche, vous pourriez emprunter le sentier qui longe l’Eure depuis le pont d’Arromanches vers l’entrée de l’ancienne abbaye. Le site de l’abbaye est privé mais les berges sont
publiques.
Les parties les plus anciennes de Bonport sont très sobres. Bâties et sculptées avec de la pierre
calcaire de Vernon, les salles vous présentent l’architecture typique des abbayes de l’odre de Cîteaux (du nom de l’abbaye qui définit les règles de vie des moines cisterciens). Elles sentent bon
le XIIIe siècle avec des croisées d’ogives régulières, des ouvertures fines et hautes (les « lancettes »), de petites colonnes aux décorations très sobres. C’est ce que vous retrouverez dans le
réfectoire, la cave, la cuisine.
Au XVIe siècle, les rois de France s’autorisèrent à désigner les abbés. Ils placèrent à la tête des
abbayes les fils de grandes familles aristocrates. Les abbés, furent de moins en moins des religieux mais des propriétaires qui s’enrichissaient des gains agricoles réalisés par les moines. Ces
nouveaux propriétaires apportèrent avec eux le confort. C’est pourquoi une partie de Bonport ressemble à un château et non à une abbaye de moines vivant dans le dénuement. Ainsi vous verrez des
boiseries finement sculptées, des parquets luxueux et des cheminées nombreuses (apportant donc un chauffage presque inconnu des moines du Moyen Âge). Même les grandes fenêtres de la Renaissance
tranchent par leur grandeur et la luminosité qu’elles apportent. Il est loin le Moyen Âge et ses toutes petites fenêtres !
Cependant, les abbayes ont décliné. Six moines travaillaient encore en 1789 lorsque les députés
révolutionnaires décidèrent que les biens possédés par le Vatican (l’église catholique) deviendraient désormais des biens du peuple de France. Les moines de Bonport furent chassés ce qui ne fit
qu’accélérer la fin de l’abbaye. Les députés vendirent les anciennes propriétés religieuses pour financer les frais courants de l’Etat (il n’y avait plus d’impôts depuis 1789). C’est Alexandre de
la Folie, maire de Criquebeuf, qui racheta Bonport et qui vendit une partie des pierres de l’abbaye. Il fit démonter l’église, l’hospice et le cloître afin d’en vendre les pierres. L’ancien noble
concentra ses efforts sur les parties les mieux conservées. C’est ainsi que, visiteurs, vous trouverez à l’état de ruine l’ancienne église et le cloître…
Dernière anecdote pour épater vos amis : pourquoi le nom de Bonport ? Depuis Le Batelier d’Aviron,
chroniqueur de la Renaissance, la tradition veut que le « bon port » désigne le sauvetage par la Vierge-Marie du fondateur de l’abbaye, Richard Cœur de Lion. En effet Richard, duc de Normandie et
roi d’Angleterre, plongea dans les eaux de Seine afin de chasser un cerf. Alors qu’il failli se noyer, il pria la Vierge-Marie de l’amener sur la berge. Il revint sur la rive et fit bâtir
l’abbaye du bon port afin de remercier l’aide du ciel… Cette histoire, peu flatteuse pour Richard Cœur de Lion, ressemble plus à un jeu de mots qu’à une explication. En effet, les armes de
l’abbaye montrent la naissance du Christ ce qui nous fait dire que le bon port désigne, dans l’esprit des moines, la venue du Christ parmi les hommes…
Horaires :
Ouvert samedi et dimanche du 1er avril au 30 juin et du 1er septembre au 31 septembre.
Ouvert tous les jours entre le 1er juillet et le 31 août. Entrée payante.
Renseignements au 02 35 23 27 62.
Publié dans Pont-de-l'Arche magazine n° 3 (printemps 2009)
Armand Launay
Pont-de-l'Arche ma ville