Cet article fait suite à :
L’invasion prussienne de 1870-1871 aux Damps
"Les Prussiens au Pont-de-l’Arche", texte du maire Prosper Morel-Dubosc
L'occupation de Pont-de-l'Arche par l'armée prussienne en 1870-1871
Les documents que nous avons abordés ont mis en valeur le fait que Les Damps, Pont-de-l’Arche, mais aussi les villages les plus proches, ont particulièrement subi l’occupation de 1870-1871. Ceci à cause du pont de Pont-de-l’Arche qui attira le passage et le stationnement de nombreuses troupes prussiennes. Les réquisitions furent plus importantes qu’ailleurs.
En revanche, malgré la hauteur de l’humiliation et du montant des richesses pillées, Pont-de-l’Arche ne figure pas au nombre des villes martyres de cette guerre : le nombre de victimes fut minime et les dégâts matériels négligeables. Le fait que l’armée française n’ait pas opposé un front de résistance a évité des bombardements mais aussi l’explosion du pont. Et c’est là que se manifeste bel et bien la débandade de l’armée française : les mines du pont, tout comme la défense du lieu (pourtant aidé par la frontière naturelle qu’est la Seine), furent abandonnées. Quant au pont du Manoir, il ne fut pas prévu de le miner mais d’y établir une redoute tournée vers Léry… alors que les troupes allemandes vinrent du Manoir…
Les notables de Pont-de-l’Arche ne s’y trompèrent pas : faire sauter le pont de la ville eût causé plus de pertes, notamment en représailles, que d’avantages pour la ville. En attendant, il est intéressant de constater le besoin de nos deux témoins de justifier leur choix, comme si leur acte fût une lâcheté qui eût enfoncé le clou de la défaite. De plus, ces hésitations participaient bien de la réticence des conservateurs locaux vis-à-vis de la politique du Gouvernement de Défense Républicaine. Pour eux, la défense à tout prix était la dernière des aberrations, eux qui fustigeaient les républicains radicaux. Ces derniers désiraient donner à la France tous les moyens de repousser l’armée de Prusse (et d’Allemagne, en définitive) afin d’éviter de nouvelles humiliations de l’occupation car, en effet, à l’époque, le patriotisme était une valeur de gauche.
Quoi qu’il en soit, la défense française, si impressionnante fut-elle pour les généraux allemands, ne pouvait pas repousser les troupes ennemies. La grande majorité des Français appelait à la paix et ne cautionnait pas le gouvernement républicain. Alors, comme le souhaitait Bismarck, on procéda à l’élection d’une nouvelle Assemblée nationale dont les représentants ratifieraient l’armistice avec l’Allemagne. Le 8 février, les élections placèrent au pouvoir une grande majorité de conservateurs favorables à la paix. Le 17 février, Adolphe Thiers fut élu chef de l’exécutif provisoire et, dès le 21 et jusqu’au 26, il négocia la paix avec Bismarck à Versailles. La France devait verser 5 milliards de Francs d’indemnité de guerre à l’Allemagne, nouveau pays qui naquit en mars 1871.
Bismarck avait donc réussi à fédérer les Allemands en faisant défiler leurs troupes sur les Champs-Elysées. Quant à l’Alsace et la Lorraine, elles devinrent allemandes (hormis le territoire de Belfort, seule partie alsacienne restée française, et le département de la Meurthe-et-Moselle, ce qui explique sa forme étirée comme une frontière) ce qui eut pour conséquence d’exacerber plus encore le nationalisme français et l’esprit de revanche qui mena à la Première guerre mondiale.
Pour l’heure, en France, tout le monde n’était pas d’accord à propos de la cessation des combats : les milieux ouvriers, républicains radicaux ou socialistes, souhaitaient encore la guerre à outrance et l’établissement définitif d’un gouvernement républicain et populaire. C’est pourquoi, le 21 mars, la Commune insurrectionnelle de Paris fut proclamée… Ses instigateurs, appelés les Communards, ne reconnaissaient pas l’autorité de Thiers et du gouvernement de Versailles, récemment élu et traître, selon eux. La Commune fut réprimée avec barbarie, laissant derrière elle 35000 victimes et un idéal jamais éteint, parmi les révolutionnaires.
Sources
- Géfrotin A., L’Arrondissement de Louviers pendant la Guerre de 1870–1871, Louviers, 2e édition, 1875, 268 pages. Disponible à la médiathèque de Louviers sous la cote : H.L. in /8 155 SEXT.
- Les Prussiens au Pont-de-l’Arche, anonyme, manuscrit de 1872. Disponible aux Archives Municipales de Louviers sous la cote : 4 H 13 (classement non définitif).
- Roth F., La Guerre de 1870, Hachette, Collection Pluriel, Paris, 1993, 778 pages.
Armand Launay
Pont-de-l'Arche ma ville
commenter cet article …