Dans quelques jours, le calvaire situé à l’encoignure du chemin de la Procession et de la rue Charles-Cacheleux prendra 137 ans.
Le calvaire de la Procession en 2009 (photo A. Launay)
Il fut érigé à l’entrée sud de la ville, au-dessus d’elle, le 17 octobre 1875 grâce aux donations de M. et Mme Quenneville et sur leur propriété.
La même année, le 30 janvier, l’Assemblée nationale votait l’amendement Wallon qui, en définissant le mode d’élection du président par les députés et les sénateurs, donnait officiellement le nom de république au régime politique français. 86 ans après la Révolution et 83 ans après la Première République, les républicains prenaient définitivement le pouvoir aux royalistes, parmi lesquels étaient les catholiques. Ces derniers rallièrent peu à peu la république après l’encyclique papale Au milieu des sollicitudes écrite en 1892.
Or, en 1919 Etienne-Alexandre Sorel écrivit dans son ouvrage Pont-de-l’Arche durant la Révolution qu’ « un nouveau calvaire a été érigé en réparation de l’outrage fait à l’ancien » (page 92).
L’ancien calvaire, poursuit l’auteur, a été brulé et démoli le 28 novembre 1793 suite à un vote unanime du Conseil municipal présidé par Jacques Joseph Alexandre. Les élus voulurent détruire eux-mêmes ce calvaire situé entre la place Aristide-Briand et le haut du boulevard de la Marne, à l'angle du garage Renault*. Cependant, ils furent devancés par les soldats de l’armée révolutionnaire stationnant dans la ville. C’est certainement sous leur contrainte que les élus votèrent cette profanation.
En effet, quand le Conseil municipal évoqua la démolition d’un calvaire menaçant ruine, le 10 juillet 1791, un écriteau fut posé peu après sur le monument : « On fera feu sur quiconque enlèvera ou fera enlever le Calvaire de sa place ». Emus, les élus votèrent la réparation du calvaire qui eut lieu le 18 juillet. La France n’était pas encore gagnée par le courant de déchristianisation qui a accompagné le pouvoir républicain.
Dans un climat apaisé, le calvaire présente aujourd’hui l’image du Christ crucifié en métal moulé, porté par une croix de bois plantée dans un socle calcaire. Celui-ci porte l’inscription « Aimez-vous les uns les autres à dit Jésus ». La réconciliation a même été forcée en 1905 où les biens paroissiaux sont devenus bien communaux. Depuis lors, l'église Notre-Dame-des-arts et le calvaire qui nous intéressent sont des propriétés communales.
En 1992, ce calvaire fut restauré par la Ville de Pont-de-l'Arche représentée par son maire, Paulette Lecureux... 200 ans après l'instauration de la Première République.
La dernière restauration du calvaire de la Procession eut lieu en 1992. Elle fut assurée par son propriétaire... la Ville de Pont-de-l'Arche dont le premier magistrat était Paulette Lecureux.
Depuis, un plaisantin a effacé le « j » laissant ainsi apparaitre Esus, le nom d’une divinité celte qu’on apaisait - d’après les Scolies de Berne - en suspendant un homme à un arbre. Une autre tradition que le christianisme n'a pas révolue !
* d'après observation des cartes postales éditées vers 1910 et qui montrent clairement une haute borne en pierre blanche. Ce calvaire est localisé sur un plan daté de 1773.
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Armand Launay
Pont-de-l'Arche ma ville