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20 septembre 2019 5 20 /09 /septembre /2019 12:13

 

Nous proposons ici un début de description d’un bâtiment disparu : le manoir du roi. Nous avons forgé ce nom à partir de son appellation de manoir, au XIXe siècle, et du fait qu’il était la propriété directe du roi. 

 

Détail de la vue de E. Cagniard, inspiré d'Hyacinthe Langlois qui représenta, avant 1816, cette portion des remparts de Pont-de-l'Arche. Le manoir du roi est le vaste bâtiment situé derrière le rempart. (photographie de Jean Mesqui d'après l'original conservé aux archives de l'Eure).

Détail de la vue de E. Cagniard, inspiré d'Hyacinthe Langlois qui représenta, avant 1816, cette portion des remparts de Pont-de-l'Arche. Le manoir du roi est le vaste bâtiment situé derrière le rempart. (photographie de Jean Mesqui d'après l'original conservé aux archives de l'Eure).

 

Les documents les plus explicites de l’existence de ce bâtiment sont des gravures. La première est signée E. Cagniard, artiste de Rouen. Il doit s’agir de Jean-Baptiste Espérance Cagniard, né en 1825 et décédé en 1891. Cette vue peut se consulter aux archives départementales de l’Eure sous la cote 1 Fi 838. Elle servit d’illustration à l’ouvrage de Léon de Duranville : Essai historique et archéologique sur la ville du Pont-de-l’Arche. Documents supplémentaires (1870). Elle fut réalisée d’après un croquis d’Hyacinthe Langlois, artiste né à Pont-de-l’Arche. Elle doit dater d’avant 1816, date où les remparts jouxtant l’église furent arasés comme nous l’apprend une délibération du Conseil municipal du 2 mai 1816.

On y voit encore les remparts dans ce qui semble être leur hauteur d’origine. Ils sont percés d’une série d’archères à moins qu’il s’agisse de passages pour les solives des hourds. La tour de Crosne est nettement visible. 

Immédiatement derrière les remparts se trouve un immense bâtiment : c’est le manoir du roi. Ses dimensions sont impressionnantes et c’est par cette vue que l’on prend le plus aisément conscience de son existence. La forte inclination du toit nous fait songer à une architecture médiévale. 

 

 

Vue de E. Cagniard dans son intégralité (photographie de Jean Mesqui d'après l'original conservé aux archives de l'Eure).

Vue de E. Cagniard dans son intégralité (photographie de Jean Mesqui d'après l'original conservé aux archives de l'Eure).

Une autre vue, celle de Garneray en 1790, illustre ce que fut ce bâtiment. On le retrouve proche de la tour de Crosne mais un peu plus distant. Ses dimensions sont plus réalistes, semble-t-il, mais le dessinateur fut aussi frappé par sa hauteur émergeant des remparts. Il ne semble pas qu’il fut parallèle aux remparts longeant la Seine. Il doit au contraire avoir formé une diagonale barrant l’angle-droit où se trouve la tour de Crosne. En somme, il devait avoir une orientation nord-est‒sud-ouest.    

En 1790, Aubin-Louis Millin présenta à l’Assemblée constituante une œuvre recensant le patrimoine national. Dans le chapitre 43 de ses désormais célèbres Antiquités nationales l’auteur accorde quelques belles pages à Pont-de-l’Arche. Il aborde notamment « … le château de Pont-de-l’Arche, actuellement démoli, et que j’ai fait dessiner au moment de la destruction… ». Il s’agit d’une vue sur le châtelet de Limaie, alors en démantèlement. On y voit, en arrière plan, la tour de Crosne et le manoir du roi. Reproduite ci-dessus, elle fut dessinée par Garneray et sculptée par Desmaisons.

En 1790, Aubin-Louis Millin présenta à l’Assemblée constituante une œuvre recensant le patrimoine national. Dans le chapitre 43 de ses désormais célèbres Antiquités nationales l’auteur accorde quelques belles pages à Pont-de-l’Arche. Il aborde notamment « … le château de Pont-de-l’Arche, actuellement démoli, et que j’ai fait dessiner au moment de la destruction… ». Il s’agit d’une vue sur le châtelet de Limaie, alors en démantèlement. On y voit, en arrière plan, la tour de Crosne et le manoir du roi. Reproduite ci-dessus, elle fut dessinée par Garneray et sculptée par Desmaisons.

 

 

Les vues précédentes correspondent à un élément du patrimoine bâti existant aujourd’hui : la cave de la tour de Crosne. Nous l’avons visitée en 2010 grâce à son propriétaire : William Bertrand. Si le rempart forme presque un angle-droit au niveau de la tour Crosne, cette cave serait orientée à 45° de la tour. Son entrée actuelle ne semble pas d’origine. Elle est faite en brique et moellons de silex et commence à s’engager dans la terre le long du rempart, depuis l’est de la tour. Après un premier escalier, un virage se fait sur la gauche, vers le centre de la ville et la voute diffère. Il s’agit alors d’une voute médiévale, avec des arcs en tiers-point chanfreinés, qui devait, selon toute vraisemblance, permettre d’entrer depuis la tour de Crosne. Un second escalier permet de prendre de la profondeur et d’aboutir à une nef principale d’une dizaine de mètres de long sur deux de large, avec des alcôves de part et d’autre. Ces alcôves ont été partiellement murées. Cette cave aurait bien pu être la cave du manoir du roi. Elle en aurait formé la ligne coupant symétriquement le bâtiment et le reliant à la tour de Crosne.

 

 

Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.
Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.
Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.
Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.
Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.
Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.

Différentes vues de la cave de la tour de Crosne (clichés Armand Launay, mai 2010). Il se peut qu'elle ait servi de cave au manoir du roi et, même, de passage entre celui-ci et la tour.

 

Une autre référence se trouve aux pages 74 et 75 de l’étude de Paul Goujon intitulée “L’Hôtel-Dieu et les pénitents du Pont-de-l’Arche”. Elle fut publié dans la revue La Normandie dans le n° 3 de mars (pages 66-76) et n° 4 d’avril (pages 105-115) de l’année 1897. Paul Goujon y écrivit que Les pénitents étant trop à l’étroit dans l’hôtel-Dieu [au-dessus de la Salle d’Armes], ils voulurent fonder un couvent. Avec l’aide de Richard Cyrot [curé de la paroisse] qui leur donna 1 500 livres, ils acquirent « un vieux manoir avec cour et jardin, dépendant du domaine du roi, habité autrefois par Charles le Sergent, vicomte et receveur du domaine du Pont-de-l’Arche, décédé en 1647, et situé entre la rue et les remparts, près de la porte appelée anciennement Saint-Jean [la porte de Crosne], qui avait été murée. Le terrain, avec plusieurs bâtiments en ruine, avait une longueur de quarante toises, de la propriété Durant, eslu au Pont-de-l’Arche, le plus proche voisin, jusques aux remparts de la ville et à la tour du côté de Bonport [qu’on n’appelait donc pas encore tour de Crosne], et une largeur de trente et une toises de la muraille bordant la rue aux remparts de la Seine ; il occupait en partie l’emplacement de la propriété actuelle de M. L’abbé de Lanterie.” 

La description correspond aux vues précédentes : il s’agit de l’encoignure de la tour de Crosne, entre la porte de Crosne et les remparts. Nous apprenons que le lieu était déjà devenu inutile aux vicomtes, remplacés depuis par des lieutenants du bailli. Qui plus est, la propriété de l’abbé de Lanterie nous est connue. Il l’acquit de son père, Marie-Auguste de Subtil de Lanterie (1789-1875). Celui-ci s’établit à Pont-de-l’Arche avant 1825 et fit rehausser la tour de Crosne avant 1854 comme le montre l’observation des gravures anciennes.    

Il semble que ce manoir royal fût le siège des vicomtes qui étaient, au départ, ses fonctionnaires. Ils habitaient donc non loin de la vicomté qui est devenue le bailliage. Ce manoir constituait donc une propriété à part dans la ville. Résidence du pouvoir, il était bâti sur un terrain vaste. La démolition du manoir a donc laissé un espace étonnamment vide pour le centre-ville intramuros aux maisons le plus souvent blotties les unes contre les autres. 

 

Armand Launay

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8 septembre 2019 7 08 /09 /septembre /2019 15:38

 

Quand on les nomme, on les appelle “les poternes”, faute de savoir précisément à quoi on a affaire. Il s’agit des deux alcôves situées en contrebas du pont Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, là où les escaliers penchent drôlement. Une poterne désigne une porte piétonne perçant l’enceinte de fortifications médiévales. Mais, cette appellation elle-même est problématique : pourquoi mettre deux portes côte-à-côte ? Quelle fut leur utilité, si proches de l’ancienne porte de Pons, une des quatre grandes entrées de la ville, qui se trouvait à l’entrée de la rue Jean-Prieur (rue du marché) ? De plus, pourquoi faire entrer des passants dans l’espace non bâti d’une propriété privée située à contremont ? 
 

 

 

Les mystérieuses alcôves en mars 2010 (cliché Armand Launay) le long du pont du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, du côté des Damps.

Les mystérieuses alcôves en mars 2010 (cliché Armand Launay) le long du pont du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, du côté des Damps.

 

Observons le rempart, oh oui !

Le rempart qui nous intéresse ici se trouve entre la rue Jean-Prieur (rue du marché) et le quai de Verdun (les berges de l’Eure, où s’installe la fête foraine de la Sainte-Anne). Il est longé par le pont et deux volées d’escaliers ne possédant aucun nom officiel. Cette partie des remparts de la ville a été inscrite sur l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939.

Les escaliers déformés par un tassement de terrain (juillet 2018, cliché Armand Launay).

Les escaliers déformés par un tassement de terrain (juillet 2018, cliché Armand Launay).

 

Dans sa partie haute, seul demeure le tracé des anciens remparts. Ce tracé est aujourd’hui occupé par un mur d’enceinte en brique et moellon calcaire et, aussi, par une petite maison qui servait, naguère, de cabinet de feu le docteur Attal. Ce mur se poursuit jusqu’au dessus du rempart du quai de Verdun. Il repose sur une élévation de terre retenue par les anciens remparts. De ces anciennes fortifications, il reste l’épaisseur d’un mur longeant les escaliers sans nom dont nous traitons. Les escaliers cachent, en partie, les vestiges des remparts. 

Dans sa partie la plus basse, au nord, ce mur comporte toujours quelques belles pierres de taille qui semblent dater des XVIIe et XVIIIe siècles et qui servaient de parement aux murs d’enceinte. Remaniées depuis, elles se situent de part et d’autre des alcôves qui nous intéressent. Les autres pierres sont des moellons calcaires qui servaient au remplissage des murs. L’état général de ce mur est sain. Il semble donc avoir fait l’objet de restaurations assez récentes, peut-être au XIXe siècle et après 1952 pour les jointures (comme le démontre une vue de 1952 reproduite plus bas). 

Vue sur les alcôves en juin 2010 (cliché Armand Launay).

Vue sur les alcôves en juin 2010 (cliché Armand Launay).

 

En contrebas, sur le quai de Verdun, on peut voir et mesurer l’épaisseur de ce mur. On comprend que ces quelques parties du rempart ont été préservées car elles avaient toujours une utilité : celle de retenir la masse de terre de la propriété sise plus haut, intramuros. 

L'épaisseur du rempart à l'angle des escaliers des alcôves et du quai de Verdun (2008 et 2010, clichés Armand Launay).
L'épaisseur du rempart à l'angle des escaliers des alcôves et du quai de Verdun (2008 et 2010, clichés Armand Launay).

L'épaisseur du rempart à l'angle des escaliers des alcôves et du quai de Verdun (2008 et 2010, clichés Armand Launay).

 

L’épaisseur du rempart ?

Elle va bien merci. Dans sa partie haute, le mur du rempart laisse apparaitre quelques pierres alignées les unes au-dessus des autres. Elles sont légèrement décalées vers l’Est (vers Les Damps, à gauche de notre photographie) par rapport au mur sur lesquelles elles reposent. Il semble qu’on ait affaire au départ d’un mur de parement de l’ancienne tour d’angle qui se trouvait ici et qui fut représentée par le cartographe Nicolas Magin, vers 1702, dans un plan des fortifications de la ville conservé à la Bibliothèque nationale de France et accessible sur Gallica. 

Plan de la ville et de ses fortifications vers 1702 par le cartographe Nicolas Magin. On y voit, au nord-Est, une vaste tour d'angle.

Plan de la ville et de ses fortifications vers 1702 par le cartographe Nicolas Magin. On y voit, au nord-Est, une vaste tour d'angle.

 

Les pierres des voutes, hum ?

La comparaison avec une photographie de 1952 (plus bas) montre que des grilles ont été apposées depuis et, sûrement, de petits murets au niveau du sol ; ceci pour éviter les intrusions et sécuriser ainsi les passants, voire les importuns. On peut imaginer que ces légers aménagements ont fait suite à l’inauguration du pont (1955) et des escaliers contigus.

Cette vue de 1952 montre aussi une alvéole, sur la partie gauche, ressemblant à un petit espace de stockage.

Les clés des deux voutes, en pierres de taille de moyen appareil, composent deux arcs surbaissés. Ces pierres ressemblent à celles du rempart que nous datons volontiers des XVIIe et XVIIIe siècles.  

Sur cette photographie de septembre 1952, issue des studios Henry (Louviers), les ouvriers travaillant à la culée de la rive gauche du nouveau pont s'étonnent devant ces vestiges de maçonneries. Au second plan se voit une des deux alcôves qui forment ici notre sujet. A gauche, on voit aussi une alvéole.

Sur cette photographie de septembre 1952, issue des studios Henry (Louviers), les ouvriers travaillant à la culée de la rive gauche du nouveau pont s'étonnent devant ces vestiges de maçonneries. Au second plan se voit une des deux alcôves qui forment ici notre sujet. A gauche, on voit aussi une alvéole.

Et les pierres du fond des alcôves ? 

Le fond des alcôves est composé de moellons calcaires réemployés et cimentés grossièrement, sans lit et sans appareillage. Dans l’alcôve du sud (du côté du marché), une pierre taillée montre le dessin d’une nervure. Elle dût être utilisée pour une nervure de croisées d’ogives, sûrement celle de la tour d’angle ayant disparu. Nous écrivons cela car la tour de Crosne possède encore les départs des croisées d’ogives de son rez-de-place (le niveau de la place forte).

Dans l’alcôve du nord, il existe d’autres voussures, plus profondes et plus basses. Elles témoignent d’une profondeur de vaisseau légèrement plus grande.

 

Quant aux vestiges de fondations en bois ?

Notre ami Frédéric Ménissier a observé que les vestiges de fondations en bois sur le cliché ci-dessus sont sûrement à relier à l'ancienne tour d'angle. En effet, celle-ci fut érigée dans la partie la plus basse des fortifications, au bord de la Seine qui était alors plus haute et moins profonde avant les travaux des années 1930. Or le bois est un bon matériau pour constituer des assises fiables en milieu humide. Les ouvriers des années 1950 ont dû exhumer ces pièces anciennes (que nous ne datons pas) lors du creusement de la roche en vue de la construction des fondations de la culée de la rive gauche. Nécessairement, selon cette hypothèse ménissière, ces pièces de bois n'étaient pas sous le rempart qui nous intéressent. Elles devaient assoir la tour d'angle, légèrement sortie du rempart.

 

Vue sur les pierres du fond de l'alcôve du nord, du côté des berges de l'Eure (cliché Armand Launay, juin 2010).

Vue sur les pierres du fond de l'alcôve du nord, du côté des berges de l'Eure (cliché Armand Launay, juin 2010).

Le plan cadastral de 1834.

Le plan cadastral ne nous apprend pas grand chose, ici. Dessiné en 1834, il ne montre pas d’aménagements particuliers en ce lieu ; si ce n’est que la tour d’angle et la porte de Pons avaient déjà complètement disparu.

Extrait du plan cadastral de 1834 (Archives départementales de l'Eure, accessibles en ligne).

Extrait du plan cadastral de 1834 (Archives départementales de l'Eure, accessibles en ligne).

 

Bons baisers des cartes postales de 1910.

Les cartes postales des années 1910 montrent un environnement différent de celui que nous connaissons. Le pont du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny n’existait pas encore. Si les anciens fossés n’étaient toujours pas comblés en aval de la rue Jean-Prieur, ils étaient, cependant, désormais bâtis. Le long de la rue Jean-Prieur, la rue du marché, fut construite une maison en brique (du côté de la rue) et en moellon calcaire (au moins sur les murs pignons). Un vaste bâtiment, aligné dans le sens nord-sud, fut bâti qui servait d’espace de stockage. Un mur en moellon calcaire enceignait cet espace qui prolongeait le boulevard des Marronniers (aujourd’hui dit de la Marne) jusqu’à l’Eure en passant derrière le bâtiment de l’ancien bureau de poste. Une autre voie allait du quai de la Grande chaussée (aujourd’hui dit de Verdun) et remontait vers le boulevard des Marronniers. Ce mur défendait l’accès aux alcôves qui nous intéressent. Si celles-ci existaient, alors elles eussent une fonction privée.

La lecture précise des cartes postales, laisse entrevoir une différence entre le mur situé immédiatement en aval des alcôves et le reste du mur d’enceinte de la propriété. 

Il est possible qu’un propriétaire des lieux ait aménagé, un temps durant, une communication entre ses alcôves et les berges. Dans quel cas, les alcôves nous intéressant servissent d’espaces de stockage en vue de l’embarquement sur la Seine, ou après le débarquement, de matériaux divers.

Sur cette carte postale des années 1910, on aperçoit les vestiges de remparts à l'angle nord-Est de la ville. On y voit aussi le mur d'une propriété privée qui comprenait un bâtiment de stockage et une maison d'habitation accessible par la rue Jean-Prieur.

Sur cette carte postale des années 1910, on aperçoit les vestiges de remparts à l'angle nord-Est de la ville. On y voit aussi le mur d'une propriété privée qui comprenait un bâtiment de stockage et une maison d'habitation accessible par la rue Jean-Prieur.

Sur cette carte postale des années 1910, on aperçoit la maison du haut de la propriété où se trouvaient les alcôves qui nous intéressent.

Sur cette carte postale des années 1910, on aperçoit la maison du haut de la propriété où se trouvaient les alcôves qui nous intéressent.

 

 

En guise de conclusion, nous nous orientons vers l’hypothèse suivante : cette partie des remparts était particulièrement ruinée à la fin de l’Ancien Régime. Lorsque l’intendant de Rouen, Louis Thiroux de Crosne d’Arconville, autorisa en 1782 les habitants à démolir les remparts et permit à la municipalité de créer des boulevards, les pierres de cette partie des fortifications furent vite réemployées. La porte de Pons, rue Jean-Prieur, disparut ainsi que la tour de l’angle nord-Est. En 1834, il ne restait des remparts que leur tracé et quelques pierres à l’angle nord-Est de la ville. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, un propriétaire investit ce bout de fossé de la ville. À contremont, il fit construire sa maison et un bâtiment de stockage. En contrebas, il semble qu’il ait fait restaurer un bout de rempart, avec du matériau de réemploi, afin d’en faire un espace de stockage ; le tout étant protégé de murs d’enceinte. Comme le démontrent les recherches de Jean Mesqui, les alcôves semblent se situer à l'endroit de l'ancienne tour d'angle. La démolition de cette tour a dû laisser vacant un espace. Afin de maintenir la terre, il semble que des voutes ont été bâties avec du matériau de récupération et ce dans le prolongement des murs d'enceinte, permettant ainsi d'économiser de la pierre et, répétons-le, de créer un espace de stockage.

Le mystère des alcôves provient, semble-t-il, de la difficulté de faire la distinction nette entre des parties médiévales du rempart et des réemplois de matériaux des XVIIe et XVIIIe siècles et, sûrement, de siècles précédents. La difficulté se trouve aussi dans le mélange entre la fonction militaire des lieux, dont témoigne le tracé des remparts, et la réutilisation pragmatique de la seconde moitié du XIXe siècle (le soutènement, le stockage), seule période où les lieux furent à la fois privatisés et habités. Enfin, la difficulté se trouve dans une évolution plus forte et riche qu’on ne l’aurait imaginé pour un simple bout de rempart à la marge de la ville ancienne.  

 

 


Armand Launay

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4 janvier 2016 1 04 /01 /janvier /2016 15:17
Ce dessin de 1782 montre que le châtelet de Limaie était en bel état de conservation. Cette vue fut reproduite dans l'article de Léon Coutil intitulé "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)" publié dans le Bulletin de la Société d'études diverses de Louviers, tome XVI, 1921-1922.

Ce dessin de 1782 montre que le châtelet de Limaie était en bel état de conservation. Cette vue fut reproduite dans l'article de Léon Coutil intitulé "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)" publié dans le Bulletin de la Société d'études diverses de Louviers, tome XVI, 1921-1922.

Notre ville doit son nom aux multiples ponts bâtis par les rois depuis 862 sur la Seine. Ces ponts ont eu une fonction militaire (contre les Vikings et les Anglais) et de police intérieure au royaume (navigation sur la Seine, émeutes populaires, Ligues…).

Il fallait donc fortifier ces ponts. Ainsi, la ville royale de Pont-de-l’Arche fut entourée de remparts et un châtelet fut érigé sur la rive droite de la Seine, sur la paroisse d’Igoville : le fort de Limaie. Entièrement disparu mais souvent cité lorsqu’on tourne les pages de l’histoire locale, nous avons résumé l’histoire de cet ouvrage qui a laissé son nom à un hameau d’Igoville : “le Fort”…    

 

Où était ce fort précisément ?

Imaginez-vous du côté de l’ancienne poste de Pont-de-l’Arche, c’est-à-dire au niveau d’Arche immobilier de nos jours. Allez un peu plus vers Les Damps (il n’y avait alors pas autant de maisons en ce lieu). Imaginez-vous à cet endroit en 1782. Vous regardez de l’autre côté de la Seine et vous avez cette vue : le château fort de Pont-de-l’Arche, c’est-à-dire Limaie, vue depuis la coste d'amour. Le pont que vous connaissez de nos jours toucherait sur ce dessin la berge d'Igoville presque à l'endroit de la tour d'angle la plus proche de nous. Ce dessin est une reproduction d’une illustration parue dans un article de Léon Coutil intitulé "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)".

 
Pour localiser plus précisément ce châtelet disparu, nous avons dessiné sur la vue satellitaire de Google earth quelques tours, les remparts et le corps de garde contrôlant l’accès nord du pont.

Pour localiser plus précisément ce châtelet disparu, nous avons dessiné sur la vue satellitaire de Google earth quelques tours, les remparts et le corps de garde contrôlant l’accès nord du pont.

 

Description d’ensemble

 

Le châtelet est protégé par deux fossés en eau. S’il n’est pas sûr que les ingénieurs aient utilisé une ancienne ile alluviale pour bâtir le châtelet, il est évident qu’ils ont profité du fond de la vallée de la Seine pour aménager ces deux protections naturelles.

Le premier fossé n'est pas protégé. Il barre d'accès au premier rempart, une palissade dans le document de 1640 signé P. Petit, ci-dessous, qui est accessible par un pont-levis au bout d'un petit pont de pierre.

Le second fossé protège le rempart principal. Un pont en pierre constitue le principal accès au châtelet. La vue de P. Petit montre un petit pont-levis contrôlé par un corps de garde. Un second pont, en bois celui-ci, offre accès à une poterne, peut-être pour un meilleur déploiement de la garnison durant un assaut, voire pour une contre-attaque.

Le second et principal rempart est flanqué de tours cylindriques. Deux possèdent une terrasse, une autre est couverte d'un toit conique. Un angle est étonnant ; celui du sud-Est, donnant sur la Seine. Il est constitué d'un angle droit dans le rempart et semble ne servir que de poste de guet. C'est la tour maitresse, la tour philipienne, qui devait assurer le gros de la défense de ce côté-ci du châtelet, ainsi que des engins de tir sur une sorte de chemin de ronde plus élargi le long du flanc Est. Dans la cour intérieure, se trouvent des potagers, des jardins, quelques maisons blotties contre les remparts. Une chapelle (placée sous le vocable de Saint-Étienne) est visible côté nord et reconnaissable à une croix surplombant le pignon Est situé près de la poterne. Une longue maison semble tenir lieu de caserne devant la tour maitresse. Selon le plan de 1640, quelques demeures longent le chemin central reliant les deux garde-corps. Selon la vue de Gomboust, c'est bien plutôt un rempart intérieur qui interdit l'accès vers la caserne et la tour maitresse. Les deux ont très bien pu se compléter comme le montre un plan de 1754 plus bas dans cet article.

 

Nous voyons donc ici une suite impressionnante d'obstacles visant à garder le contrôle de l'entrée nord du pont. Avec une faible garnison, le châtelet de Limaie était en mesure de résister à plusieurs semaines d'assaut avant l'arrivée de renforts. Sans compter que, tant que la ville de Pont-de-l'Arche n'était pas prise, elle pouvait ravitailler Limaie.

 

 

 
"Plan du chasteau du ¨Pont de l'Arche" par P. Petit, 1640, cabinet des estampes, Bibliothèque nationale de France.

"Plan du chasteau du ¨Pont de l'Arche" par P. Petit, 1640, cabinet des estampes, Bibliothèque nationale de France.

Illustration du tome I de l’Encyclopédie médiévale, 1873, d’Eugène Viollet-le-Duc (illustration de l’article “châtelet“ de Wikipédia).

Illustration du tome I de l’Encyclopédie médiévale, 1873, d’Eugène Viollet-le-Duc (illustration de l’article “châtelet“ de Wikipédia).

"Chasteau du Pont de l'Arche" par Jacques Gomboust, extrait de l'ouvrage du cartographe Matthäus Merian (vers 1593-1650) intitulé Topographiae Galliae et publié en 1657. Une comparaison entre les vues précédentes montre qu'Eugène Viollet-le-Duc a reposé son travail sur celui de Jacques Gomboust.

"Chasteau du Pont de l'Arche" par Jacques Gomboust, extrait de l'ouvrage du cartographe Matthäus Merian (vers 1593-1650) intitulé Topographiae Galliae et publié en 1657. Une comparaison entre les vues précédentes montre qu'Eugène Viollet-le-Duc a reposé son travail sur celui de Jacques Gomboust.

Qui a bâti Limaie ?

Le choix de l’emplacement du fort ne fait aucun mystère : protéger l’entrée du pont à la place de fortifications antérieures dont les plus anciennes datent de Charles le Chauve. Mais qui a fait bâtir les fortifications que nous voyons dans les vues du XVIIIe siècle ?

Jusqu’à plus ample informé, la plus ancienne mention du nom de Limaie date de 1198, encore sous le règne de Richard Cœur de Lion donc. On la retrouve dans les Grands rôles de l’Échiquier de Normandie : “Limai de Capite Pontis Arche” c’est-à-dire Limai à la tête du pont de Pont-de-l’Arche.

Nous avons consacré un article aux fortifications de Pont-de-l’Arche, la ville et aussi, un peu, de Limaie. Nous avons vu que Richard Cœur de Lion avait consacré presque 1000 livres à des travaux sur le pont et les fortifications de Pont-de-l’Arche, soit le vingtième d’un budget annuel. Pas étonnant que le nom de Limaie ait été associé à ces importants travaux. Dans cet article, nous avons aussi vu que son rival, Philippe Auguste, avait fait de Pont-de-l’Arche sa résidence après qu’il a pris possession de la Normandie. Il fit faire des travaux sur le pont et les remparts. Il installa son administration et signa en ce lieu beaucoup d’actes royaux. Notre analyse fait ressortir que les fortifications archépontaines s’inscrivent nettement dans l’architecture militaire de Philippe Auguste. Une tour philippienne en est l’élément le plus clair dans l’enceinte de Limaie.

Nous concluons que Limaie a été bâti par Philippe Auguste sur les bases édifiées par Richard Cœur de Lion. Le châtelet que nous voyons sur les vues du du XVIIIe siècle est donc un jeune homme de presque 500 ans qui a eu l’air de bénéficier de restaurations régulières.

 

Que signifie le nom de “Limaie” ?  

Belle énigme que ce nom de Limaie ! Jacques Le Maho le rattache au mot latin “limites” désignant la limite, ici entre les deux pays gaulois que sont le Roumois (pays de Rouen) et l’Évrecin (pays d’Évreux). Le châtelet de Limaie aurait donc bien marqué une limite. Nous pouvons penser qu’il a surtout constitué un passage à travers cette limite, un point de contrôle, tant au niveau de la route qu’au niveau de la navigation. La limite en question concernait certainement plus la navigation que la route ou la frontière entre pays. Nous restons cependant sur notre faim car il dût il y avoir d’impressionnantes quantités de lieux-dits “la limite” si ce nom permettait à nos ancêtres d’identifier aisément des lieux.

Nous nous sommes intéressés à l’homophone Limay, près de Mantes (Yvelines) où la thèse de la limite est aussi défendue dans le Lexique toponymique de l’arrondissement de Mantes-la-Jolie de Claude Guizard. L’encyclopédie Wikipédia rapporte aussi que “La localité est attestée sous le nom Limaium en 1249. Le nom de "Limay" parait être abrégé de celui de "Limais" ou plutôt "Li Mais", qui veut dire la maison, la demeure, l'habitation, en latin Mansio.” À se demander ‒ une fois encore ‒ pourquoi il n’y a pas plus de Limaies dans les pays romans ?

L’étonnant point commun entre notre Limaie et le Limay des Yvelines est sa position vis-à-vis de la grande ville : à la sortie du pont sur la rive opposée de la Seine. Le pont de Limay, face à Mantes, date du XIe siècle. Si la thèse de la “limite” était bonne, nous pourrions envisager que ce sont les habitants de Mantes et de Pont-de-l’Arche qui désignaient par limite les habitations ou constructions militaires situées à la limite du pont. Là cette appellation aurait été suffisamment concrète pour ce nom soit significatif.

Nous en sommes donc aux conjectures. La thèse du “limites” latin pourrait aussi nous renvoyer vers le proche mot “limus” qui a donné limon. Le limon est peut-être un point commun entre Limay, Limaie et Limetz (Yvelines)... des lieux habités près du fond de la vallée de la Seine ?

D’autres conjectures sont possibles. Le plan cadastral d’Igoville nomme précisément “Les Limais” la zone autour de la ferme située à l’Est de l’auberge du Pressoir, au bord de l’ancienne route du Manoir. On pourrait rattacher ce nom aux ormaies, les bois formés d’ormes, du latin “ulmus” et qui est lié à la racine, si je puis dire, indo-européenne “al” comme dans alisier (une des étymologies possibles d’Alizay)…

 

Autres représentations visuelles

Le fort de Limaie : un châtelet sur la Seine à Pont-de-l’Arche
Le corps de garde contrôlant l'accès nord du pont de Pont-de-l'Arche. Détail d'un vitrail de l'église Notre-Dame-des-arts (cliché Armand Launay, 2007).

Le corps de garde contrôlant l'accès nord du pont de Pont-de-l'Arche. Détail d'un vitrail de l'église Notre-Dame-des-arts (cliché Armand Launay, 2007).

La représentation la plus étonnante est celle du vitrail du montage des bateaux. Ce vitrail se trouve dans l’église Notre-Dame-des-arts, autrefois Saint-Vigor, et date de 1606. Comme nous l’avons décrit dans un article, ce vitrail a constitué une revendication de la paroisse sur certaines taxes perçues sur les commerçants passant sous le pont. Or, ces taxes furent détournées par la garnison de Limaie.

En attendant la représentation est belle, surtout en ce qui concerne les monteurs de bateaux. Le fort de Limaie est bien mis en valeur, pour ne pas dire montré du doigt, au centre de la perspective qui se trouve dans l'axe de la route reliant les deux garde-corps du châtelet. La représentation n'est toutefois fidèle à la réalité. Ceci particulièrement net dans le nombre de tours, volontairement limité ici, et la grandeur du petit pont donnant accès au châtelet.

« Plan du château du Pont de l'Arche pour servir au projet de l'année 1754 ». Ce plan aquarellé (41 x 54 cm), est conservé à la Bibliothèque nationale de France, département Arsenal, et accessible sur Internet : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb421591410. Il confirme plutôt les vues de P. Petit et Jacques Gomboust.

« Plan du château du Pont de l'Arche pour servir au projet de l'année 1754 ». Ce plan aquarellé (41 x 54 cm), est conservé à la Bibliothèque nationale de France, département Arsenal, et accessible sur Internet : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb421591410. Il confirme plutôt les vues de P. Petit et Jacques Gomboust.

Quelles furent ses activités ?

La fonction du fort de Limaie était avant tout d'assurer la police intérieure : le contrôle de la circulation sur le pont et sous ce pont. Ces passages étaient taxés. Le châtelet constituait de plus une caserne, non loin de Rouen, prête à intervenir en cas de souci.

La suite de ce paragraphe provient des écrits de Léon Coutil. Nous préciserons nos recherches plus tard.

Cependant, Limaie a aussi été utile en matière militaire. C'est ainsi qu'en 1417, le châtelet fut réparé et complété afin de résister aux Anglais. L'effort fut vain car Pont-de-l'Arche, ville et fort compris, tomba sous la domination d'Henry V d'Angleterre. Le fort de Limaie ne fut repris par les Français qu'en 1449 que grâce à la ruse (par abus de confiance d'un soldat du corps de garde).

Sous les guerres de religions, le château et la ville restèrent aux mains des catholiques.

Mais Limaie trouva une autre utilité, contraire aux intérêts du roi ce coup-ci. En effet, après la reddition de Pont-de-l'Arche à Henri IV en 1589, le châtelet resta aux mains des Ligueurs. Qui plus est, pendant la Fronde, le gouverneur était le marquis de Chamboy qui ne rendit le château que le 7 février 1650. Limaie pouvait très bien être une base hostile au roi.

 

Pourquoi et quand fut-il détruit ?

Le châtelet de Limaie avait perdu de son intérêt militaire. De plus, il avait été utilisé à plusieurs reprises contre le pouvoir royal. C'est ainsi que le projet de démolition de Limaie fut approuvée par Louis XIV peu après 1650. Cependant, une vue de 1782 montre que le châtelet avait encore fière allure et que, comme toute base militaire, le pouvoir ne trouvait pas sa destruction urgente. Limaie servait notamment de prison, notamment pour certains protestants.

Le coup de grâce a été donné à LImaie par Louis Thiroux de Crosne (1736-1794), intendant de la généralité de Rouen de 1768 à 1787. Cet homme, une sorte de Préfet de l’époque, fit appliquer certaines ordonnances royales traitant d’urbanisme. Il fit ainsi dresser les plans des boulevards de Rouen avant de combler les fossés médiévaux. Il en fit de même dans d’autres villes haut-normandes (Louviers) et donna son accord à la municipalité de Pont-de-l’Arche d’utiliser le déblai de la corvée pour aplanir la place des Champs (délibération du conseil municipal de Pont-de-l’Arche du 16 septembre 1779). Puis, il autorisa le conte de Pons, gouverneur de Pont-de-l’Arche, à faire démolir le châtelet de Limaie (1782). La somme récupérée de la vente des pierres permit de démolir deux portes de chaque côté de la ville, comme le souhaitent les habitants. En hommage, la municipalité décida de donner le nom de Crosne à la porte Saint-Jean et de Pons à la porte de Léry (rue Jean-Prieur) (délibération du 20 avril 1782).

 
En 1790, Aubin-Louis Millin présenta à l’Assemblée constituante une œuvre recensant le patrimoine national. Dans le chapitre 43 de ses désormais célèbres Antiquités nationales l’auteur accorde quelques belles pages à Pont-de-l’Arche. Il aborde notamment « … le château de Pont-de-l’Arche, actuellement démoli, et que j’ai fait dessiner au moment de la destruction… ».  Il s’agit d’une vue sur le châtelet de Limaie, alors en démantèlement. Reproduite ci-dessus, elle fut dessinée par Garneray et sculptée par Desmaisons.

En 1790, Aubin-Louis Millin présenta à l’Assemblée constituante une œuvre recensant le patrimoine national. Dans le chapitre 43 de ses désormais célèbres Antiquités nationales l’auteur accorde quelques belles pages à Pont-de-l’Arche. Il aborde notamment « … le château de Pont-de-l’Arche, actuellement démoli, et que j’ai fait dessiner au moment de la destruction… ». Il s’agit d’une vue sur le châtelet de Limaie, alors en démantèlement. Reproduite ci-dessus, elle fut dessinée par Garneray et sculptée par Desmaisons.

L’espace autrefois occupé par le fort de Limaie ne resta pas longtemps sans emploi. En effet, en 1813 Napoléon fit réaliser un canal et une écluse auxquels nous avons consacré un article. Pour cela, l’ile fut transformée et un fossé du châtelet servit partiellement au percement du canal. Léon Coutil précisa qu'en 1918, on boucha l'écluse et après la démolition des derniers vestiges des vieux murs on construisit au-dessus des hangars. La photographie ci-dessous montre ces derniers vestiges.

Cette reproduction de carte postale des années 1910 montre le pont enjambant le canal de l'ancienne écluse de Napoléon. Remarquez, à gauche, ce qui semble être (le dernier ?) vestige du châtelet de Limaie.

Cette reproduction de carte postale des années 1910 montre le pont enjambant le canal de l'ancienne écluse de Napoléon. Remarquez, à gauche, ce qui semble être (le dernier ?) vestige du châtelet de Limaie.

Découvertes de vestiges de fondations du fort de Limaie par les équipes travaillant à la construction du pont actuel de Pont-de-l'Arche (de 1951 à 1954). Il semble que l'arc de cercle en bas de cliché (studio Henry, Louviers, page 15 de la référence ci-dessous) montre une partie de la tour maitresse. Le reste est plutôt méconnaissable.

Découvertes de vestiges de fondations du fort de Limaie par les équipes travaillant à la construction du pont actuel de Pont-de-l'Arche (de 1951 à 1954). Il semble que l'arc de cercle en bas de cliché (studio Henry, Louviers, page 15 de la référence ci-dessous) montre une partie de la tour maitresse. Le reste est plutôt méconnaissable.

Sources

- Coutil Léon, "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)" publié dans le Bulletin de la Société d'études diverses de Louviers, tome XVI, 1921-1922 ;

- Le Maho Jacques, « Un grand ouvrage royal du IXe siècle : le pont fortifié dit « de Pîtres » à Pont-de-l’Arche (Eure) », pages 143-158, in Des Châteaux et des sources. Archéologie et histoire dans la Normandie médiévale : mélanges en l’honneur d’Anne-Marie Flambard Héricher, Publications des universités de Rouen et du Havre, 2008, 622 pages ;

- Ministère des travaux publicsLe nouveau pont-route de Pont-de-l’Arche : 1951-1954, imprimerie Logier et Cie, 32 pages.

Armand Launay

Pont-de-l'Arche ma ville

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25 novembre 2015 3 25 /11 /novembre /2015 11:55

La ville de Pont-de-l’Arche (Eure) est connue pour son patrimoine et notamment ses vestiges de fortifications (partiellement classés ou inscrits aux Monuments historiques). De quand datent ces remparts ? Par qui et pourquoi ont-ils été érigés ? Aucun travail n’a encore posé la question.

Mise à jour de 2023 : Nous disposons depuis de l'étude de Jean Mesqui, spécialiste des châteaux médiévaux, et de Denis Hayot. Elle a pour titre "Histoire des fortifications du château, du pont et de la ville de Pont-de-l’Arche, des années 1200 à la fin du XVIIIe siècle". Vous la trouverez de la page 233 à la page 320 (avec ses riches annexes) de l'ouvrage paru en 2023 sous la direction de Vincent Carpentier et Cyril Marcigny et intitulée Pont-de-l'Arche et le fort d'Alizay-Igoville (Eure) : les fortifications de la Seine normande, de l'âge viking à la guerre de Cent ans. Dans cette étude, on trouvera aussi une présentation des fouilles réalisées par l'INRAP au fort de Limaie. L'ouvrage a été édité aux Presses universitaires de Caen. 

Pont-de-l’Arche depuis la rive droite de la Seine. Lithographie d’E. Cagniard, Rouen, d’après un croquis d’Eustache Hyacinthe Langlois (extrait de Léon de Duranville, Essai historique…, 1870).

Pont-de-l’Arche depuis la rive droite de la Seine. Lithographie d’E. Cagniard, Rouen, d’après un croquis d’Eustache Hyacinthe Langlois (extrait de Léon de Duranville, Essai historique…, 1870).

Des fortifications du IXe siècle… bien évanouies !

Les premières fortifications de Pont-de-l’Arche datent de 862-873. Charles le Chauve, roi des Francs, fit bâtir un immense pont de bois sur la Seine afin de retarder, voire de repousser les Vikings. Le souverain fit construire deux tours-porches, en bois et en pierre, aux entrées du pont1. À l’évidence, les vestiges que nous voyons aujourd’hui dans la ville ne correspondent pas à ces fortifications du IXe siècle. En 1020, une charte de duc de Normandie Richard II cite la paroisse de Pont-de-l’Arche, organisée autour de l’église Saint-Vigor. Elle dépend de l’abbaye de Jumièges. Cette charte démontre que le châtelet de la rive gauche a laissé place à une ville dont aucune fortification n’est citée. Seules des archives du XIIe siècle mentionnent des fortifications à Pont-de-l’Arche.

 

Les importants travaux de Richard Cœur de Lion

L’Échiquier de Normandie2, parlement rassemblant les notables du duché, a enregistré les recettes et les dépenses des ducs de Normandie. Nous nous sommes intéressés à celles de Richard II, dit Cœur de Lion, après son retour de croisade et de captivité (février 1194). Le roi d’Angleterre et duc de Normandie entreprit de restructurer la défense de la Normandie que convoitait le roi de France, Philippe Auguste. La pièce majeure du dispositif de défense est le célèbre Château Gaillard bâti, un peu plus tard, entre 1197 et 1198, qui couta près de 37 000 livres au trésor. À partir de 1194, Richard Cœur de Lion investit dans de nombreuses places-fortes le long de la frontière avec la France : Lyons-la-Forêt, Radepont, Arques, Driencourt, Moulineaux, Orival, Bellencombre, Le Vaudreuil et… Pont-de-l’Arche.

 

Nous avons noté les principales sommes confiées aux ingénieurs en charge des travaux (operationibus). Trois dépenses concernent uniquement Pont-de-l’Arche sans mentionner son château3 :

- 190 livres pour Guillaume Engelais et Roger Falel4 ;

- 200 livres pour Guillaume Tyrel5 ;

- 40 livres pour Éric et Guillaume Tyrel6.

 

Cependant, la majeure partie des dépenses concernent plusieurs châteaux (castri) à la fois.

Cinq dépenses concernent les châteaux de Pont-de-l’Arche et du Vaudreuil :

- 300 livres pour Éric et Guillaume Tyrel7 ;

- 100 livres pour Éric et Guillaume Tyrel8 ;

- 140 livres pour Éric et Guillaume Tyrel9 ;

- 100 livres pour Éric et Guillaume Tyrel10 ;

- 100 livres pour Éric et Guillaume Tyrel11.

 

Une dépense concerne les châteaux de Pont-de-l’Arche et de Radepont :

- 360 livres pour Guillaume Tyrel12.

 

À la lecture de ces sommes, nous notons que Pont-de-l’Arche a bénéficié du travail de plusieurs maitres. La majeure partie des dépenses concernent le château. Sans plus de précisions sur la répartition des dépenses, nous ne pouvons définir exactement le montant dépensé pour Pont-de-l’Arche. Cependant, pour avoir un ordre d’idée, nous avons divisé en parts égales les dépenses imputées à Pont-de-l’Arche et Radepont (360 divisés par 2 = 180) et Pont-de-l’Arche et Le Vaudreuil (740 divisés par 2 = 370). Ce total de 550, additionné aux dépenses propres à Pont-de-l’Arche (420), donne 980 livres.

 

Pour évaluer l’importance des sommes consacrées aux fortifications de Pont-de-l’Arche, nous avons additionné les autres principaux investissements de fortifications engagés durant ce laps de temps par Richard Cœur de Lion en Normandie orientale. Lorsque les montants concernaient deux fortifications, nous les avons divisés par deux.
 

Places fortes

Dépenses

Totaux

Le Vaudreuil

32 + 10 + 100 + 100 + 200 + 211 + 150 + 50 + 70 + 50 + 50

1023

Pont-de-l’Arche

190 + 200 + 40 + 180 + 150 + 50 + 70 + 50 + 50

980

Lyons-la-Forêt

75 + 400

475

Radepont

75 + 100 + 180

355

Arques

225 + 100

325

Driencourt

225 + 100

325

 

À la lecture de ce tableau, on mesure que Le Vaudreuil et Pont-de-l’Arche étaient au centre des priorités militaires de Richard Cœur de Lion. Selon Jean Favier, le revenu royal avoisinait les 22 000 livres en 1193-1194 puis environ 20 000 livres les années suivantes13. La dépense consentie à Pont-de-l’Arche n’était donc pas anecdotique puisqu’elle représentait le vingtième du budget annuel.

Sans plus d’éléments sur la nature des travaux entrepris par Richard Cœur de Lion, nous nous nous sommes demandé si le contexte politique et militaire pouvait nous apporter un certain éclairage.

 

Philippe Auguste enfonce la frontière de l’Epte (1192-1195)

Depuis le traité de Saint-Clair-sur-Epte (911), les rois de France ont souhaité – et tenté, pour certains d’entre eux – de reprendre la main sur la Normandie. Ils l’ont d’autant plus espéré que les ducs de Normandie sont devenus rois d’Angleterre à partir de 1066, c’est-à-dire plus puissants que les rois de France. Au XIIe siècle, l’empire anglo-normand dépassait largement la Normandie et l’Angleterre et comprenait notamment la Guyenne (l’”Aquitaine”, région de Bordeaux), le Maine, l’Anjou… Un duel se déroula entre Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste. Lors d’une trêve, où ils firent bâtir conjointement l’abbaye de Bonport, à Pont-de-l’Arche, les deux monarques partirent en croisade en 1191. Mais le roi de France rentra plus tôt. Il voulait profiter de l’absence de Richard II pour reconquérir la Normandie, alors gérée par Jean sans Terre, le frère de Richard II. En avril 1193, Philippe s’empara du Vexin et de Gisors, Aumale, Eu, Ivry, Pacy14. En janvier 1194, Jean sans Terre abandonna à Philippe l’Est de la Seine sauf Rouen. À la fin de l’hiver et au début du printemps 1194, Philippe prit Le Vaudreuil, Évreux et Le Neubourg. Il menaça Rouen jusqu’à l’annonce du retour de Richard. En effet, après la croisade et une période de captivité en Bavière, Richard arriva à Londres le 14 mars 1194 et débarqua à Barfleur à la mi-mai 1194. Richard infligea une imposante défaite à Philippe Auguste le 3 juillet 1194 à Fréteval (vallée du Loir). Jean sans Terre et le comte d’Arundel, à la tête des bourgeois de Rouen, assiégèrent alors Le Vaudreuil, occupé par des troupes françaises. Ils furent chassés par Philippe Auguste, venant de Fréteval.

 

C’est alors que Richard arriva en personne. C’est ce que décrit L’Histoire de Guillaume le Maréchal, conte de Striguil et de Pembroke, qui mentionne la marche de Richard vers Pont-de-l’Arche dont la tête de pont était brisée. Le roi l’aurait fait réparer rapidement15. C’est peut-être ce qui explique la somme versée à Guillaume Engelais et Roger Falel qui est antérieure à toutes les autres sommes versées à Éric et Guillaume Tyrel pour Pont-de-l’Arche et Le Vaudreuil (voir plus haut). L’Histoire de Guillaume le Maréchal montre ensuite que Philippe fit sournoisement tomber les remparts du château du Vaudreuil, en juillet, alors qu’il faisait mine de négocier avec Richard. Puis il partit. Une trêve fut signée le 23 juillet 1194 entre les deux rois suite à une intervention papale. Cette trêve dura jusqu’en janvier 1196 et, selon Alain Sadourny16, fut le « théâtre de préparatifs militaires » qui concernent Pont-de-l’Arche.

 

Richard et la fortification de la vallée de la Seine (1195-1197)

Comme l’écrivit Jean Yver17 : « … tout l’effort qui, une ou deux décennies auparavant, au temps de Henri II, s’était appliqué aux forteresses du Vexin, s’est concentré sous Richard Cœur de Lion sur ce secteur de la Seine, devenu crucial par l’effondrement de l’autre. » Richard profita de la trêve conclue en juillet 1194 pour verrouiller la vallée. Ainsi on retrouve parmi les dépenses miliaires Le Vaudreuil, Pont-de-l’Arche, Radepont et Lyons-la-Forêt. Ces places-fortes entouraient le Vexin et barraient la route de Rouen. Pont-de-l’Arche était particulièrement intéressant par son pont barrant la Seine et qui venait d’être fraichement restauré. Ces travaux entrepris par Richard confirment l’intérêt qu’il exprima pour Pont-de-l’Arche à l’occasion d’une charte signée avec les moines de Jumièges le 18 janvier 1195. En effet, le monarque donna sa baronnie de Conteville aux moines contre Pont-de-l’Arche, désormais propriété ducale directe18. Des pourparlers de paix eurent ensuite lieu au Vaudreuil et Issoudun (novembre et décembre 1195) entre Richard et Philippe. Ils furent officialisés par le traité de Gaillon le 14 janvier 1196 qui laissait à Philippe le Vexin et Gisors, Vernon, Gaillon, Neaufles, Pacy et Ivry. Cependant, au printemps 1196, le roi de France rompit l’accord de paix en attaquant Aumale. Richard, sachant à quoi s’en tenir, décida la construction de l’immense Château Gaillard.

 

Jean sans Terre et Pont-de-l’Arche

La mort de Richard II en 1199 changea le rapport de forces entre l’Angleterre et la France. Jean sans Terre succéda à son frère et fut très tôt débordé par Philippe Auguste. En 1202, Jean sans Terre enleva la fille du comte d’Angoulême et confisqua les terres de barons aquitains. Ceux-ci se tournèrent vers le roi de France, leur suzerain, qui cita Jean sans Terre devant sa cour. Celui-ci ne vint pas et la cour prononça la commise de tous les fiefs qu’il tenait du roi. L’armée de Philippe II s’engouffra en Normandie. Au début du mois de mars 1203, Montfort-sur-Risle et Beaumont-le-Roger abandonnèrent le roi Jean, bientôt rejoints par Le Vaudreuil qui se rendit au roi de France sans combattre. Fin aout, Radepont chuta. Après 6 mois de siège, le verrou de la Seine, Château Gaillard, céda le 6 mars 1204. Rouen capitula à la fin du mois de juin 1204. Enfin les dernières places se livrèrent : Arques, Verneuil et Pont-de-l’Arche. Guillaume le Breton, hagiographe du roi de France, signala que Jean sans Terre détruisit le pont en 1204 : « Ainsi tourmenté par les remords de sa conscience, le malheureux détruit lui-même ses propres biens et renverse le pont que l'on appelle de l'Arche...19 » En 1204, Philippe Auguste devint maitre de la Normandie. Quelle fut la place de Pont-de-l’Arche sous la gouvernance du roi de France ?

 

Pont-de-l’Arche : résidence normande de Philippe Auguste

Nous savons que Philippe Auguste voulait assoir son pouvoir en Normandie. Il doutait de la fidélité des Normands et voulait prévenir toute tentative de reconquête par Jean sans Terre. Dans ce cadre, il renforça ou reconstruisit des places fortes et les munit de garnisons. Il n’oublia pas Pont-de-l’Arche qu’il reprit en fief direct en 1210 où il donna aux moines de Jumièges la baronnie de Conteville en dédommagement20. Les moines conservèrent le patronage de l’église Saint-Vigor et furent exemptés de péage pour la circulation de leurs biens sous le pont de la ville. L’échange fut de nouveau confirmé en 1246 par Louis IX21.

Coupé par Jean sans Terre, le pont dût vraisemblablement bénéficier d’une reconstruction sous Philippe Auguste.

L’importance de Pont-de-l’Arche peut aussi se lire à travers le nombre de séjours de Philippe Auguste dans la ville. Ce sont les actes royaux, signés de la sa propre main, qui nous renseignent sur ses lieux de résidence. Ainsi, John Baldwin22 a dénombré 49 actes signés à Pont-de-l’Arche entre 1204 et 1223 ce qui représente 3 % des actes connus de Philippe II. Cela fait de Pont-de-l’Arche le 7e lieu de résidence du roi et le premier de Normandie, surtout après 1215 où l’on dénombre 33 actes. C'est aussi à Pont-de-l'Arche que semble fonctionner le mieux l'administration royale que le roi a renforcé dans la ville, donnant ainsi de bonnes bases au futur bailliage.

Peut-être qu'un certain Guillaume du Pont-de-l'Arche a-t-il joué un rôle entre sa ville et son roi. Ce membre d'une famille aristocratique a été évêque de Lisieux de 1218 à 1250. Il avait la confiance de Philippe II.

Si Philippe Auguste a résidé à Pont-de-l’Arche, c’est que la ville fortifiée et son château de l’autre côté de la Seine garantissaient la sécurité du roi et ce à 20 km de Rouen. Le capétien pouvait surveiller la capitale normande sans s’exposer à une éventuelle insurrection populaire. Ainsi, très soucieux de la police intérieure, le roi de France a ordonné et financé une campagne des travaux de renforcement de ses fortifications. L’ingénieur militaire, Guillaume de Flamenville, fut missionné vers 1210 pour faire une tourelle à Pont-de-l’Arche sur les fonds reçus pour la ville d’Évreux23… le document ne donne pas de précision permettant de localiser cette tourelle. Il s'agit peut-être d'une tour philipienne du château de Limaie (voir plus bas). Confirmant l’intérêt miliaire de la place, le trésor royal a aussi détaillé les dépenses de munitions conservées dans des tours archépontaines24.

Arrivé à ce point de notre exposé, nous avons vu que Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste ont doté Pont-de-l’Arche de fortifications. Mais qui a fait quoi ? Nous avons voulu tendre vers ce degré de précision en analysant le type de constructions visibles sur les cartes et illustrations anciennes mais aussi sur le terrain contemporain.


 

Notes

1 Le Maho Jacques, « Un grand ouvrage royal… »

2 Léchaudé d’Anisy Amédée-Louis, « Grands rôles des Échiquiers de Normandie »…, p. 164.

3 Il s’agit du château de la rive droite qui défendait l’accès du pont en venant de Rouen. Connu aussi sous le nom de fort de Limaie et succédant aux fortifications en bois construites au IXe siècle sur ordre de Charles le Chauve.

4 Ibidem, page 42, 2e colonne : Willelmo Engelais et Rogerio Falel pro operationibus de Ponte Arche 190 lib. per id. brev.

5 Ibidem, page 48 : Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche 200 lib. per id. brev.

6 Ibidem, page 73 : Item Magistro Eurico et Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche 40 lib. per id. brev.

7 Ibidem, page 48 : Magistro Elrico et Willelmo Tyrel ad operationes Vallis Rodolii et Pontis Arche 300 lib. per id. brev.

8 Ibidem, page 72, 2e colonne : Magistro Elrico et Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche et Vallis Rodolii 100 lib. per id. brev.

9 Ibidem, page 72, 2e colonne : Magistro Elrico et Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche et Vallis Rodolii 100 lib. per id. brev. Eisdem ad easdem operationes 40 lib. per id. brev.

10 Ibidem, page 73 : Magistro Eurico et Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche et Vallis Rodolii 100 lib. per id. brev.

11 Ibidem, page 73 : Magistro Eurico et Willelmo Tyrel ad operationes Pontis Arche et Vallis Rodolii 100 lib. per id. brev.

12 Ibidem, page 42, 2e colonne : In operationibus de castri de Ponte Arche et de Radepont per Willelmum Tyrel 360 lib. per id. brev.

13 Favier Jean, Origines et destins d’un empire (XIe-XIVe siècles), voir page 391.

14 Sadourny Alain, « La fin de la Normandie Plantagenêt », page 145.

15 Nous avons consulté l’édition de Paul Meyer, 1894, tome II, p. 14 : « Puis [Richard] s'en vint dreit al Pont de l'Arche / Qui dépeciez esteit de front / En poi d'ure refist le pont… »

16 Opere citato.

17 Yver Jean, « Philippe Auguste et les châteaux normands... », voir page 236.

18 Vernier Jean-Jacques, Chartes de l'abbaye de Jumièges…, acte CLXVIII, page 119.

19 Le Breton Guillaume, La Philippide, voir pages 210 et 211.

20 Loth Julien (éd.), Histoire de l’abbaye royale de Saint-Pierre de Jumièges, Rouen, Métérie, 1882-1885, 305 pages. Chapitre 8. Vraisemblablement, Jean sans Terre avait annulé l’échange effectué en 1195 par Richard Cœur de Lion.

21 Delisle Léopold, page 75, acte n° 459, juillet 1246, Evreux.

22 Baldwin John, Philippe Auguste, voir le tableau de la page 66.

23 Chatelain (André), « Recherche sur les châteaux de Philippe Auguste ». L’auteur site ses sources à la Bibliothèque nationale de France : registre a f° 93 r°.

24 Delisle Léopold (publié par), « Cartulaire normand de Philippe Auguste… », page 34 : Hee sunt munitiones castrorum domini Regis. Falesia, Oxime, Pons Audomari, Bonavilla, Molinella, Vallis Rodolii, Harecurtis, Anetum, Paciacum, Vernonem, Lions, Andeliacum, Gaillardum, Britolium, Ebroicas, Guletum, Rothomagum, Mortuum Mare, Archie. [Apud] Pontem Archie. X. lorice, X. galee, capelli XXXI., quarelli LX.m baliste de cornu XXI. de quibus due sunt ad tornum, et XV lignee de quibus sunt ad tornum, gamboissons XVII., croci IIII, turni tres.

 

 

La place-forte de Pont-de-l’Arche et le château de Limaie :

description architecturale

 

Les archives citées jusqu’alors laisseraient volontiers penser que Richard Cœur de Lion est père des remparts de Pont-de-l’Arche. Mais ces sources sont trop lacunaires. Nous poursuivrons cet exposé par une description architecturale des vestiges archépontains et d’illustrations que nous comparerons à des fortifications leur ressemblant.

Il y avait deux systèmes défensifs à Pont-de-l’Arche : la ville fortifiée, au sud du pont ; et le fort de Limaie, bastion barrant l’accès nord du pont.

 

Plan d’ensemble de la ville fortifiée

Nous avons dessiné (ou tenté de le faire) les remparts tels qu’ils devaient être au Moyen âge. Nous nous sommes fondés sur le plan cadastral de 1834 ; l’Atlas de Trudaine (réalisé vers 1759) ; le plan de Nicolas Magin (dressé avant 1742) ; un plan des archives départementales de l’Eure (6 pl. 49) ; un croquis de Léon Coutil datant de 1922 et sur des observations de terrain. Sur le dessin, les vestiges sont remplis de noir. Les parties disparues sont représentées en gris.

Plan de la ville de Pont-de-l'Arche avec ses remparts tels qu'ils devaient être au XVIIIe siècle (carte d'A. Launay, décembre 2015)

Plan de la ville de Pont-de-l'Arche avec ses remparts tels qu'ils devaient être au XVIIIe siècle (carte d'A. Launay, décembre 2015)

Les remparts de la ville longent l’Eure (la Seine avant les années 1930) et forment un vaste demi-cercle tourné vers le sud. Les courtines étaient percées par quatre entrées protégées de tours jumelles : une donnait sur le pont ; une deuxième sur la route d'Elbeuf ; une troisième sur la place Aristide-Briand et une dernière vers Les Damps. En plus de ces portes d’entrées, la ville comptait 9 tours. Certaines d’entre elles étaient des tours d’angles cylindriques (la tour de Crosne, la tour des Damps, la tour Louise, la tour du bailliage). Les autres étaient des tours hémicylindriques remplies qui flanquaient les courtines. Des fossés secs entouraient les remparts en arc de cercle. La description qui suit part de la porte de Crosne (1) et commente les éléments constitutifs des remparts dans le sens des aiguilles d’une montre jusqu’à la tour du bailliage (17).

 

La porte de Crosne, ancienne porte Saint-Jean (1)

Seul vestige d’une des quatre entrées de ville, ce premier niveau d’une des tours de la porte de Crosne a été sauvé par Marie-Auguste de Subtil de Lanterie (1789-1875) qui construisit une maison d’habitation au second niveau et autour. La tour subsistant a une forme en « u ». Elle est percée de deux archères partiellement obstruées. Elle est située dans le prolongement d’un édifice rectangulaire dans lequel on peut encore voir le passage de la herse surmonté d’un départ de voute, visible sur deux clés. Sa partie basse a été enterrée lors du comblement du fossé. Cet édifice privé fut inscrit sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939.

Elle porta le nom de Saint-Jean depuis, au moins, 1340 (cf. le cartulaire de Bonport, par Jules Andrieux) et fut rebaptisée "porte de Crosne" le 20 avril 1782. Le conseil municipal d'Ancien Régime voulut remercier l'Intendant de Rouen, Louis Thiroux de Crosne d'Arconville, d'avoir accepté de raser les remparts devenus vétustes et encombrants (archives municipales : BB 5).

La porte de Crosne en 2011. La rue de Crosne est située à droite du mur (cliché A. Launay).

La porte de Crosne en 2011. La rue de Crosne est située à droite du mur (cliché A. Launay).

Vestige d'une des tours d'entrée de la ville, rue de Crosne. Ici on voit nettement le passage de la herse et le début de la voute (cliché A. Launay, mai 2011).

Vestige d'une des tours d'entrée de la ville, rue de Crosne. Ici on voit nettement le passage de la herse et le début de la voute (cliché A. Launay, mai 2011).

La tour de Crosne (2)

La tour de Crosne est une tour cylindrique située à l’angle nord-ouest. Seule est conservée sa partie basse jusqu’au rez-de-jardin intérieur. Une archère est visible depuis l’extérieur. A l’intérieur, les corbeaux et les départs d’une croisée d’ogive sont encore visibles. La partie haute est une construction romantique bâtie vers 1850 que l’on doit au propriétaire Marie-Auguste de Subtil de Lanterie (1789-1875). C’est sous ce nom qu’elle était connue il y a encore un siècle. Cet édifice privé fut classée Monument historique le 9 aout 1941. Lire notre article plus approfondi en cliquant ici.

 
La tour de Crosne en mai 2011, coiffée d’une restauration romantique de la première moitié du XIXe siècle (cliché A. Launay).

La tour de Crosne en mai 2011, coiffée d’une restauration romantique de la première moitié du XIXe siècle (cliché A. Launay).

La tour de Crosne en 1831 dans la collection de dessins de Louis Deglatigny conservée à la bibliothèque de Rouen. Elle porte au dos la mention : "Vue prise de la terrasse d'Est au Pont de l'Arche". L'est ici se mesure par rapport à la tour qui, elle, est bien évidemment à l'ouest des remparts de la ville. Ce dessin est anonymeOn le retrouve numérisé parmi les documents du site rotomagus.fr (merci à ses agents de la sélection des documents et du travail réalisé !).

La tour de Crosne en 1831 dans la collection de dessins de Louis Deglatigny conservée à la bibliothèque de Rouen. Elle porte au dos la mention : "Vue prise de la terrasse d'Est au Pont de l'Arche". L'est ici se mesure par rapport à la tour qui, elle, est bien évidemment à l'ouest des remparts de la ville. Ce dessin est anonymeOn le retrouve numérisé parmi les documents du site rotomagus.fr (merci à ses agents de la sélection des documents et du travail réalisé !).

La tour du presbytère (3)

Belle tour de flanquement hémicylindrique, on voit plusieurs étapes de construction apparaitre sur l'appareillage de la tour du Presbytère. Avec la tour Saint-Vigor, elle possède des traces du chemin de ronde. Cet édifice privé fut classé Monument historique le 9 aout 1941 ainsi que la courtine attenante.

 

La tour du presbytère vue depuis le Quai-Foch. Observez la poterne surmontée d'un arc en tiers point à sa droite (cliché Armand Launay, avril 2006).

La tour du presbytère vue depuis le Quai-Foch. Observez la poterne surmontée d'un arc en tiers point à sa droite (cliché Armand Launay, avril 2006).

La tour du presbytère vue depuis la propriété de la tour de Crosne (cliché A. Launay, juillet 2012).

La tour du presbytère vue depuis la propriété de la tour de Crosne (cliché A. Launay, juillet 2012).

La tour Saint-Vigor (4)

Grâce à l’important dénivelé, les vestiges de cette tour de flanquement hémicylindrique sont visibles sur une grande hauteur. Sa partie basse est évasée afin de renforcer ses assises. Nous avons forgé ce nom en référence à l’ancien vocable de l’église Notre-Dame-des-arts. Le garde-corps est une reconstruction plus récente. Cette tour et la courtine attenante appartiennent à la Ville de Pont-de-l’Arche. Elles furent classées Monuments historiques le 8 novembre 1939.

 
La tour Saint-Vigor vue depuis l’arrière de la sacristie (cliché A. Launay, avril 2012).

La tour Saint-Vigor vue depuis l’arrière de la sacristie (cliché A. Launay, avril 2012).

La poterne de la Petite chaussée (5)

Cette poterne donnait accès à la Petite chaussée, un des rares espaces chaussés de la ville. En effet, en ce lieu se trouvait un petit quai donnant sur la Seine (et non encore l'Eure). Il permettait le débarquement de denrées et autres matériaux ravitaillant les habitants et, notamment, la cave de l'ancien hôtel-Dieu dont un escalier donnait accès à la sente du Beauregard, à contremont de la poterne qui nous intéresse.

Des représentations anciennes montrent ce que fut cette poterne voutée en plein cintre dont les clés pourraient bien avoir été réemployées dans la voute de la rue Maurice-Delamare qui servait de portail à une propriété aujourd’hui disparue.

La poterne de la Petite chaussée  (détail du dessin d’Hyacinthe Langlois référencé au début de cette étude).

La poterne de la Petite chaussée (détail du dessin d’Hyacinthe Langlois référencé au début de cette étude).

La poterne de la Petite chaussée, tout à droite de ce dessin de Samuel Prout de 1821. Au centre, une tour de la porte de Rouen et le logis construit autour ; logis souvent appelé "maison du portier".

La poterne de la Petite chaussée, tout à droite de ce dessin de Samuel Prout de 1821. Au centre, une tour de la porte de Rouen et le logis construit autour ; logis souvent appelé "maison du portier".

La porte de Rouen (6)

Cette entrée de la ville, qui donnait directement sur le tablier du pont, était défendue par deux tours cylindriques, évasées à la base, et surmontée d’un logis. Aucun vestige ne subsiste aujourd’hui. Sur le plan cadastral de 1834, la tour reste un peu visible. Nous avons forgé ce nom par opposition à la porte de Paris. Elle était aussi appelée porte de l'eau, nom donné à la Seine dans l'ancien temps.

La porte de Rouen, à droite du pont, était défendue par deux tours en « u ». Une d’entre elles apparait sur ce dessin réalisé vers 1840 par Edouard Lanon (musée de Louviers). Elle a été percée de grandes ouvertures et par des œils-de-bœuf. Elle sert d’appui à un vaste logis qui la dépasse et qui prend aussi appui sur une colonne plantée dans la Seine.

La porte de Rouen, à droite du pont, était défendue par deux tours en « u ». Une d’entre elles apparait sur ce dessin réalisé vers 1840 par Edouard Lanon (musée de Louviers). Elle a été percée de grandes ouvertures et par des œils-de-bœuf. Elle sert d’appui à un vaste logis qui la dépasse et qui prend aussi appui sur une colonne plantée dans la Seine.

La poterne de la Grande chaussée (7)

Autour de l’entrée du pont, une seconde poterne donnait accès à la Seine. Elle était située dans la rue Abbaye-sans-toile. Il n’en subsiste aucun vestige. Une délibération du Conseil municipal datée du 22 janvier 1857 précise que les remparts seront rasés auprès du pont afin de relier la rue de l’Abreuvoir (Abbaye-sans-toile) et la rue de la Petite chaussée « au quai large de 4 mètres qui est bâti dans le cadre des travaux du nouveau pont. »

Une vue de Nicolas Pérignon, datée de 1750, environ, et conservée à la Bibliothèque nationale de France, montre la poterne de la Grande chaussée, côté intramuros. Nous reproduisons ci-dessous la vue disponible dans Gallica, la partie numérisée des fonds de la BnF.

Qui a bâti les fortifications de Pont-de-l’Arche ?
La poterne de la Grande chaussée, vue de l'extérieur des remparts, dans une publication du début du XIXe siècle. Elle fait partie de la collection de dessins de Louis Deglatigny. Elle est signée par C. Merlin et se trouve conservée dans les fonds de la bibliothèque municipale de Rouen. On la retrouve numérisée parmi les documents du site rotomagus.fr. On voit ici que la porte voutée de l'Ancien Régime a laissé place à une porte à linteau de dimensions plus modestes. Cela dût accroitre le besoin d'ouvrir la voie en ce lieu.

La poterne de la Grande chaussée, vue de l'extérieur des remparts, dans une publication du début du XIXe siècle. Elle fait partie de la collection de dessins de Louis Deglatigny. Elle est signée par C. Merlin et se trouve conservée dans les fonds de la bibliothèque municipale de Rouen. On la retrouve numérisée parmi les documents du site rotomagus.fr. On voit ici que la porte voutée de l'Ancien Régime a laissé place à une porte à linteau de dimensions plus modestes. Cela dût accroitre le besoin d'ouvrir la voie en ce lieu.

Tour et courtine de Jeucourt (8)

Ancienne tour de flanquement hémicylindrique complètement rasée. Nous avons forgé ce nom en référence au Manoir de Jeucourt, premier nom connu du Manoir de Manon (rue Jean-Prieur) et référence au seigneur de Jeucourt, capitaine de la ville. La courtine s’étend sur plusieurs dizaines de mètres. Elle a fait l’objet de nombreuses réparations contre le montrent ses matériaux divers, surtout à l’emplacement de la tour disparue (notre photo). Au-dessus des petites maisons de brique, elle présente quelques archères assez larges immédiatement en dessous du chapeau de gendarme qui couvre le garde-corps. D’imposantes pierres de taille constituent cette courtine qui ne ressemble en rien aux vestiges de la porte de Crosne, de la tour de Lanterie, du bailliage et de la tour Louise. Ce rempart est inconnu des Monuments historiques.

 
La courtine de Jeucourt, quai de Verdun, la partie la plus récente des remparts  de Pont-de-l’Arche comme l’indiquent les briques et, plus généralement, la diversité des matériaux (cliché A. Launay (janvier 2006).

La courtine de Jeucourt, quai de Verdun, la partie la plus récente des remparts de Pont-de-l’Arche comme l’indiquent les briques et, plus généralement, la diversité des matériaux (cliché A. Launay (janvier 2006).

La tour des Damps (9)

Tour cylindrique située à l’angle nord-est de la place forte. Elle était déjà complètement rasée en 1834 lorsque le plan cadastral fut dessiné. Nous avons forgé cette appellation en référence aux Damps, commune limitrophe.

 

Les poternes des Damps (10)

Nommées poternes depuis quelques dizaines d’années faute de comprendre leur fonction, ces vestiges sont situés dans l’alignement du rempart. Ils se trouvent dans une zone où les fortifications ont été largement remaniées. Ainsi des appareillages très divers entourent ces deux voutes qui pourraient bien avoir servi de cave sous un bâtiment encore visible sur les photographies de 1910. Les grilles n’ont été posées que depuis l’aménagement de l’escalier public vers la fin de la construction du pont (1951-1955). Cette partie des remparts, propriété privée, a été inscrite sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939. Pour le nom, voir à « la tour des Damps ».

Les « poternes » orientées vers Les Damps (cliché A. Launay, décembre 2010).

Les « poternes » orientées vers Les Damps (cliché A. Launay, décembre 2010).

La porte de Pons, autrefois Sainte-Marie (11)

Cette porte a totalement disparu. Si les portes de la ville étaient similaires, les plans anciens et les vestiges de la porte de Crosne nous laisseraient entrevoir que la porte de Pons était munie de deux tours en U surmontées d’un logis ; renforcées par une herse et un pont-levis. Le 20 avril 1782, le gouverneur de Pont-de-l’Arche, dénommé Pons, obtint de l’intendant Louis Thiroux de Crosne l’autorisation de détruire les fortifications de Pont-de-l’Arche et Limaie. En remerciement, la municipalité donna le nom de Pons à cette porte donnant vers Les Damps (archives municipales : BB 5).

En 1340, cet endroit se nommait « porte Sainte Marie » (Jules Andrieux, Cartulaire de Bonport, page 393).

 

La tour Sainte-Marie (12)

Le tracé de cette tour de flanquement hémicylindrique est encore visible sur le plan cadastral de 1834. Cependant, il n’en subsiste aucun vestige. Nous avons forgé ce nom en référence à la rue Sainte-Marie qui longe ici le rempart.

 

La tour Louise et sa courtine (13)

La tour Louise, nom donné sur un document de la Conservation régionale des monuments historiques, est la tour d’angle cylindrique du sud-est des fortifications archépontaines. Elle est conservée jusqu’au niveau du corps de place. Le comblement partiel du fossé ne masque pas l’évasement de la base de cette tour. Elle fut inscrite sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939. La notice des Monuments historiques indique l’existence d’une casemate voutée ce que nous n’avons pas vérifié. Cette tour est devenue une propriété publique en 2011 afin de raser une maison moderne qui gâchait cette partie la mieux préservée des fossés de la cité médiévale.

La tour Louise en 2010. Sa base évasée est nettement visible grâce à la conservation partielle des fossés médiévaux (cliché A. Launay, janvier 2010).

La tour Louise en 2010. Sa base évasée est nettement visible grâce à la conservation partielle des fossés médiévaux (cliché A. Launay, janvier 2010).

La tour de Rouville (14)

Cette tour de flanquement hémicylindrique a complètement disparu avant la réalisation du plan cadastral de 1834. Nous avons forgé ce nom en référence à la place de Rouville, située immédiatement au nord, dans le corps de place.

 

La porte de Paris, autrefois porte de Louviers (15)

Nous avons forgé ce nom sur l’ancienne appellation de la rue Président-Roosevelt : rue de Paris. En 1340, cet endroit se nommait « porte de Louviers » (Jules Andrieux, Cartulaire de Bonport, page 393). En 1699, une délibération du Conseil municipal la nomme porte des Champs, certainement par opposition à la porte de l’eau, vers Rouen. Cette appellation rappelle l’utilité des espaces mis en culture autour de la ville jusqu’à une période récente.

À quoi ressemblait cette porte sud de la ville qui a entièrement été rasée ? Certes il reste bien des fondations mises au jour brièvement lors des travaux de rénovation du centre-ville dans les années 1990 et lors de la réhabilitation de la place Aristide-Briand entre 2013 et 2014. Mais celles-ci ne nous permettent pas de reconstituer cette porte.

C’est un plan de Nicolas Magin, un plan de 1773, ainsi que le cadastre de 1834, qui nous donnent l’image la plus précise de ce que devait être cette porte.

Ci-dessous nous reproduisons un détail d'un plan au 1/150e conservé aux Archives nationales sous le nom de "Plan des fossés et glassis de Pontdelarche..." Il constitue une annexe de l'arrêt du Conseil du 16 juillet 1773 portant sur une contestation d'abattage d'arbres par le "sieur Durufley". En haut du plan, on voit l'arc de cercle des remparts sud. Une avancée de ces remparts, notée "fort" au milieu, protège l'entrée de la ville. L'accès à ce bastion se faisait par un "petit pont" donnant, à droite, sur deux premières maisons et l'ancien calvaire. Cet endroit doit être occupé de nos jours par l'ancien garage Renault où une médiathèque est envisagée par la municipalité. Ce bastion sortant des remparts pour mieux protéger l'entrée explique la largeur de la place des Champs depuis le pied des remparts au sud de la rue Sainte-Marie jusqu'aux maisons des faubourg représentées sur le plan. Ce bastion est assurément le résultat d'un remaniement en profondeur d'une des entrées de ville telles qu'elles étaient conçues dans les fortifications philipiennes.

 
Qui a bâti les fortifications de Pont-de-l’Arche ?
Qui a bâti les fortifications de Pont-de-l’Arche ?

Ci-dessus, le plan de Pont-de-l’Arche dressé vers 1702 par le cartographe Nicolas Magin (1663-1742) montre aussi l'avancée que constituait le bastion. Il montre aussi deux tours dans l'alignement des murs d'enceinte qui offraient une défense supplémentaire à la rue de Paris. 

Les délibérations du Conseil municipal attestent que l'autorisation de combler le "pont dormant de la place des champs" fut accordée en 1747. Ces mêmes archives montrent que la place des champs fut aplanie en 1779 suite à l'autorisation de l'intendant Louis Thiroux de Crosne. C'est à partir de 1782 que les boulevards de la ville furent créés et le fort de Limaie démoli avec maintes parties des remparts.

Le plan cadastral de 1834 montre encore le pont à bascule au milieu de l’espace nommé “place Aristide-Briand” en 1937.   

Qui a bâti les fortifications de Pont-de-l’Arche ?

La tour de l’hospice (16)

Ce vestige de tour de flanquement cylindrique possède encore une petite partie du deuxième niveau. La base de cette tour est masquée par le comblement du fossé. Elle fut nommée ainsi en raison de la proximité de ce qui est devenu un Établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Cette tour fut inscrite sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939.

 
La tour de l’hospice en aout 2008 (vue prise du rempart du bailliage) avant une restauration malheureuse côté privée. Cette partie la moins bien conservée et restaurée des remparts de Pont-de-l’Arche est constituée d’une tour cylindrique dont une partie du second niveau est encore debout (cliché A. Launay, aout 2008).  Elle a bénéficié d'une restauration professionnelle dans le cadre de l'agrandissement de l'hôpital local (EHPAD) comme le montrent les clichés pris de la cour intérieure de l'hôpital (clichés de Patrice Royer, décembre 2018).
La tour de l’hospice en aout 2008 (vue prise du rempart du bailliage) avant une restauration malheureuse côté privée. Cette partie la moins bien conservée et restaurée des remparts de Pont-de-l’Arche est constituée d’une tour cylindrique dont une partie du second niveau est encore debout (cliché A. Launay, aout 2008).  Elle a bénéficié d'une restauration professionnelle dans le cadre de l'agrandissement de l'hôpital local (EHPAD) comme le montrent les clichés pris de la cour intérieure de l'hôpital (clichés de Patrice Royer, décembre 2018).
La tour de l’hospice en aout 2008 (vue prise du rempart du bailliage) avant une restauration malheureuse côté privée. Cette partie la moins bien conservée et restaurée des remparts de Pont-de-l’Arche est constituée d’une tour cylindrique dont une partie du second niveau est encore debout (cliché A. Launay, aout 2008).  Elle a bénéficié d'une restauration professionnelle dans le cadre de l'agrandissement de l'hôpital local (EHPAD) comme le montrent les clichés pris de la cour intérieure de l'hôpital (clichés de Patrice Royer, décembre 2018).

La tour de l’hospice en aout 2008 (vue prise du rempart du bailliage) avant une restauration malheureuse côté privée. Cette partie la moins bien conservée et restaurée des remparts de Pont-de-l’Arche est constituée d’une tour cylindrique dont une partie du second niveau est encore debout (cliché A. Launay, aout 2008). Elle a bénéficié d'une restauration professionnelle dans le cadre de l'agrandissement de l'hôpital local (EHPAD) comme le montrent les clichés pris de la cour intérieure de l'hôpital (clichés de Patrice Royer, décembre 2018).

La tour du bailliage (17)

La tour du bailliage est une tour cylindrique non remplie située à l’angle sud-ouest. Elle présente une belle archère ainsi qu’un début de parement de la courtine partant vers l’Est. La base de cette tour est enterrée par le comblement du fossé. Elle fut inscrite sur l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques le 15 juin 1939.

La tour du bailliage et ses courtines comptent parmi les plus beaux vestiges des fortifications de Pont-de-l’Arche (cliché A. Launay, juin 2010).

La tour du bailliage et ses courtines comptent parmi les plus beaux vestiges des fortifications de Pont-de-l’Arche (cliché A. Launay, juin 2010).

Le château de Limaie

Le château de Limaie, démantelé à partir de 1782, était un bastion protégeant l’entrée nord du pont. Ses courtines étaient bâties selon un plan presque rectangulaire, resserré sur sa partie Est. Une tour maitresse se trouvait à l’intérieur du corps de place du côté du sud-ouest. Les courtines étaient renforcées par trois tours d’angles cylindriques. La porte donnant sur le pont était renforcée de deux tourelles. Celle donnant vers le nord était défendue par une tourelle et était munie d’un pont-levis. Une poterne se trouvait au nord-ouest du corps de place. Deux fossés en eau, séparés par une palissade de bois, séparaient ce bastion de la plaine alluviale.

Nous avons accordé une étude plus approfondie à ce fort ici.

 
Dessin de 1782 représentant le fort de Limaie vu depuis la côte d'Amour, c'est-à-dire entre Pont-de-l'Arche et Les Damps. Le pont actuel touche la berge d'Igoville à l'endroit de la tour d'angle figurant sur ce dessin reproduit dans un article de Léon Coutil intitulé "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)" publié dans le Bulletin de la Société d'études diverses de Louviers, tome XVI, 1921-1922.

Dessin de 1782 représentant le fort de Limaie vu depuis la côte d'Amour, c'est-à-dire entre Pont-de-l'Arche et Les Damps. Le pont actuel touche la berge d'Igoville à l'endroit de la tour d'angle figurant sur ce dessin reproduit dans un article de Léon Coutil intitulé "Le vieux château de Limaie et le vieux pont de Pont-de-l'Arche (Eure)" publié dans le Bulletin de la Société d'études diverses de Louviers, tome XVI, 1921-1922.

Plan du chasteau du Pont de l’arche par P. Petit vu comme si nous tournions le dos à Igoville (plan antérieur à 1782).

Plan du chasteau du Pont de l’arche par P. Petit vu comme si nous tournions le dos à Igoville (plan antérieur à 1782).

Richard Cœur de Lion ou Philippe Auguste ?

 

D’après les archives, on peut raisonnablement dater les fortifications archépontaines de la fin du XIIe siècle ou du début du XIIIe siècle. Cependant, peut-on les rattacher aux constructions de Richard Cœur de Lion entre 1194 et 1195 ou à celles de Philippe Auguste après 1204 ?

Dans une étude très poussée portant sur la cuisine de l’ancienne abbaye de Bonport, Frédéric Épaud et Jean-Baptiste Vincent datent du XIIIe les murs de la cuisine. Une comparaison des moellons permet de vérifier leur ressemblance avec les moellons des vestiges archépontains, hormis ceux des bords de Seine.

 
Extrait de Frédéric Épaud, Jean-Baptiste Vincent, « La cuisine de l’abbaye cistercienne de Bonport... »

Extrait de Frédéric Épaud, Jean-Baptiste Vincent, « La cuisine de l’abbaye cistercienne de Bonport... »

Les remparts de Pont-de-l’Arche sont dotés d’éléments techniques apparus dans la seconde moitié du XIIe siècle dans le domaine Plantagenet. Ainsi les tours de flanquement hémicylindriques ou en « u » apparurent à partir de 1170-1180. Elles remplaçaient des tours de flanquement rectangulaires, saillantes, aux arêtes trop brutes. De nombreuses archères, longues et fines apparurent aussi qui remplaçaient des ouvertures plus larges. Les tours furent aussi munies d’un second étage vouté en pierre alors que, précédemment, ce type de défense était planchéié. On était entré dans l’ère de la défense active des places fortes (Jean Mesqui, Les tours à archères...).

Les remparts décrits plus hauts correspondent à ces innovations techniques. Cependant, ces dernières furent aussi maitrisées et employées par les ingénieurs de Philippe Auguste. Ils les ont même reproduits systématiquement au point d’en faire une marque du pouvoir royal.

Afin de retrouver ou non la marque de Philippe Auguste à Pont-de-l’Arche, nous nous sommes intéressé à Dourdan (Essonne). En effet, selon le castellologue Jean Mesqui (Châteaux forts... pages 153 et 154) : « Dourdan est sans doute le plus pur produit de la maitrise d’ouvrage philippienne ; dernier construit parmi les châteaux de Philippe Auguste, il est le plus abouti… »2 Achevée dans les années 1220, cette place forte est construite selon un plan rectangulaire. Elle est dotée d’une tour maitresse cylindrique de 13,6 m de diamètre isolée du corps de place par un fossé propre. Archétype des tours philipiennes, elle tour possédait un double accès. Trois angles sont pourvus de tours cylindriques, voutées en coupole et sur ogives, et munies de nombreuses archères à ébrasement simple. Les courtines sont flanquées, dans leur milieu, de tours hémicylindriques d’un diamètre extérieur de 9 m. Un châtelet à deux tours hémicylindriques protège l’entrée.

 
A gauche la tour du Midi, à Dourdan (cliché Philippe_28). A droite, la tour Saint-Vigor, à Pont-de-l'Arche (cliché A. Launay, avril 2012). Sans être jumelles, ces tours hémicylindriques appartiennent à la même époque, le XIIe siècle, et témoignent d’un même savoir-faire technique.
A gauche la tour du Midi, à Dourdan (cliché Philippe_28). A droite, la tour Saint-Vigor, à Pont-de-l'Arche (cliché A. Launay, avril 2012). Sans être jumelles, ces tours hémicylindriques appartiennent à la même époque, le XIIe siècle, et témoignent d’un même savoir-faire technique.

A gauche la tour du Midi, à Dourdan (cliché Philippe_28). A droite, la tour Saint-Vigor, à Pont-de-l'Arche (cliché A. Launay, avril 2012). Sans être jumelles, ces tours hémicylindriques appartiennent à la même époque, le XIIe siècle, et témoignent d’un même savoir-faire technique.

Pour revenir à Pont-de-l’Arche, nous remarquons que le plan rectangulaire, majeur dans la fortification philippienne, a été adapté à l’arc de cercle de la cité médiévale et à Limaie où le rectangle était quelque peu resserré vers la pointe Est de l’ile artificielle. La disposition de tours cylindriques aux angles et de tours hémicylindriques flanquant les courtines a aussi été scrupuleusement observée. Quant à la tour maitresse, dans le château de Limaie, elle était isolée de la courtine mais dans le corps de place, certainement par manque d’espace extérieur sur l’ile artificielle. Les portes étaient protégées par des châtelets à deux tours hémicylindriques. Reprenons la définition de Jean Mesqui (Châteaux et enceintes..., page 44) : « Aussi la fortification philippienne, dès lors qu’elle quitte le domaine du noyau central, se cantonne-t-elle dans l’application d’un principe majeur : celui du flanquement de courtines rectilignes par des tours sphériques, celui de la défense des portes par des massifs à deux tours. »

Nous voyons que Pont-de-l’Arche répond plutôt bien à cette définition. Nous pouvons raisonnablement avancer que, si Philippe Auguste n’a pas été le seul monarque à doter Pont-de-l’Arche de fortifications, c’est lui qui les a le plus élevées et marquées de son empreinte.

    

 
La porte d’entrée de Dourdan nous donne certainement une bonne illustration de ce que furent les entrées de Pont-de-l’Arche. Comparez les dimensions des tours ainsi que les archères de Dourdan et de la porte de Crosne à Pont-de-l'Arche (cliché Philippe_28).

La porte d’entrée de Dourdan nous donne certainement une bonne illustration de ce que furent les entrées de Pont-de-l’Arche. Comparez les dimensions des tours ainsi que les archères de Dourdan et de la porte de Crosne à Pont-de-l'Arche (cliché Philippe_28).

En guise de conclusion

Si les sources écrites ne nous permettent pas d’affirmer que Richard Cœur de Lion fut le premier duc de Normandie à doter Pont-de-l’Arche de remparts en pierre, elles attestent que celui-ci y a fait réaliser d’importants travaux.

Face à la convoitise de Philippe Auguste, Richard Cœur de Lion a fortifié la vallée de la Seine (route de Rouen) avec, au premier plan, Pont-de-l’Arche et son pont, Le Vaudreuil et le Château Gaillard. Dans ce cadre, il a aussi inclus Pont-de-l’Arche dans le domaine ducal direct. Cependant, Richard Cœur de Lion mourut en 1199 et son frère Jean sans Terre perdit la Normandie en 1204.

Philippe Auguste, peu confiant dans le peuple rouennais, fit de Pont-de-l’Arche son principal lieu de résidence en Normandie. C’est ce qu’atteste le grand nombre de documents royaux signés à Pont-de-l’Arche, place forte royale.

L’observation de vues anciennes sur le château de Limaie et l’observation des vestiges actuels rattachent les fortifications archépontaines aux constructions philipiennes : un plan rectangulaire, avec adaptation locale, comportant des tours cylindriques aux angles, des tours hémicylindriques flanquant les courtines, des châtelets à deux tours aux portes, les volumes des tours au premier rang desquelles la tour maitresse de Limaie… Nous pouvons commencer à répondre à notre question : qui a bâti les fortifications de Pont-de-l’Arche ? Il s’agit de Philippe Auguste, certainement sur les bases établies par Richard Cœur de Lion…

 

 

Sources

- Baldwin John, Philippe Auguste, Paris, Fayard, 1998, 717 pages ;

- Boussard Jacques, « Philippe Auguste et les Plantagenêts », p. 263-289, in Bautier Robert-Henri (dir.), La France de Philippe Auguste - Le temps des mutations : actes du colloque international organisé par le CNRS (Paris, 29 septembre – 4 octobre 1980), Paris : éditions du CNRS, 1982, 1034 pages ;

- Chatelain (André), « Recherche sur les châteaux de Philippe Auguste », Archéologie médiévale, tome XXI, 1991, éditions du CNRS, pages 115-161 ;

- Delisle Léopold (publié par), « Cartulaire normand de Philippe Auguste, Louis VIII, Saint-Louis et Philippe le Hardi », in Mémoire de la Société des antiquaires de Normandie, 6e volume, XVIe volume de la collection, Caen, 1852, 390 pages ;

- Duranville Léon Lévaillant de, Essai historique et archéologique sur la ville du Pont-de-l'Arche : documents supplémentaires accompagnés d’une vue de la ville de Pont-de-l'Arche, d'après un croquis de E.-H. Langlois et du fac-similé d'un plan exécuté par J. Gomboust, dans le XVIIe siècle, Rouen : A. Le Brument, 1870, 55 pages ;

- Épaud Frédéric, Vincent Jean-Baptiste, « La cuisine de l’abbaye cistercienne de Bonport (Pont-de-l’Arche, Eure) », pages 99-113, in Bulletin monumental, tome 169-2, Paris, Société française d’archéologie, 2012 ;

- Erlande-Brandenburg Alain, « L’architecture militaire au temps de Philippe Auguste : une nouvelle conception de la défense », in La France de Philippe Auguste. Le temps des mutations, Robert-Henri Bautier (dir.), Actes du colloque organisé par le CNRS (Paris, 29 septembre-4 octobre 1980), Paris, éditions du CNRS, 1982, pages 595-603 ;

- Le Breton Guillaume, La Philippide, Paris, Brière, 1825, 418 pages ;

- Léchaudé d’Anisy Amédée-Louis, « Grands rôles des Echiquiers de Normandie » dans les Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie : documents historiques, tome I, Paris, 1845, 356 pages ;

- Le Maho Jacques, « Un grand ouvrage royal du IXe siècle : le pont fortifié dit « de Pîtres » à Pont-de-l’Arche (Eure) », pages 143-158, in Des Châteaux et des sources. Archéologie et histoire dans la Normandie médiévale : mélanges en l’honneur d’Anne-Marie Flambard Héricher, Publications des universités de Rouen et du Havre, 2008, 622 pages ;

- Mesqui Jean, « Les tours à archères dans le domaine Plantagenet français 1160-1205 », p. 77-88, in Les fortifications dans le domaine Plantagenet, XIIe-XIVe siècle : actes du colloque international tenu à Poitiers du 11 au 13 novembre 1994, Université de Poitiers, 2000, 138 pages ;

- Mesqui Jean, Châteaux et enceintes de la France médiévale, volume 1 : De la défense à la résidence, Picard, 1991, 375 pages ;

- Mesqui Jean, Châteaux forts et fortifications en France, Paris, Flammarion, 1997, 493 pages ;

- Sadourny Alain, « La fin de la Normandie Plantagenêt », pages 141-151, in Le Roc’h-Morgère Louis, Richard Cœur de Lion roi d’Angleterre, duc de Normandie (1157-1199), actes du colloque international tenu à Caen, 6-9 avril 1999, Caen, Direction des archives départementales du Calvados, 2004, 365 pages ;

- Vernier Jean-Jacques, Chartes de l'abbaye de Jumièges (v. 825 à 1204) conservées aux archives de la Seine-inférieure, tome II, Rouen, Lestringant, 1916 ;

- Yver Jean, « Philippe Auguste et les châteaux normands. La frontière orientale du duché », pages 309-348, in Bulletin de la société des antiquaires de Normandie, tome LIX, 1967-1989, Caen.

 

 

Armand Launay

Pont-de-l'Arche ma ville

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28 août 2012 2 28 /08 /août /2012 15:13

A Nicolas Sovereto 

 

Presque en face de l'hôtel de Ville, à l’entrée d’un mini-square, une voute en pierre de taille reste bien mystérieuse aux yeux des Archépontains et, principalement, des collégiens passant en ces lieux. D’où vient-elle ? A quoi a-t-elle servi ? Rien n’a été écrit à ce sujet.  

 

Voute de la rue Maurice-Delamare

 

Nous avons tout d’abord lu le plan cadastral de 1834. Celui-ci montre l’existence d’une demeure – disparue depuis – en bas à droite du détail du plan reproduit ci-dessous. La parcelle de cette demeure était accessible depuis la rue de Paris, actuelle rue Maurice-Delamare. La jonction de cette parcelle et de la rue se faisait précisément à l’endroit où l’on retrouve la voute aujourd’hui. A n’en pas douter, cette voute servait de portail. C’est ce que corrobore l’observation de la voute dont le piédroit* a été taillé pour recevoir une porte.

 

Voute de la rue Maurice-Delamare (plan cadastral)

Cette voute est cintrée*. Ses claveaux* sont constitués de pierres de taille massives. Ses impostes* et sa clé de voute sont saillantes. Elle semble dater de la fin du XVIe siècle ou du début du XVIIe selon le castellologue Jean Mesqui.

Nous trouvons qu’il ressemble à la poterne de la Petite-chaussée (voir notre étude sur les remparts : "La poterne de la Grande chaussée"). Comparons la voute qui nous intéresse à celle que l’on retrouve dans une vue de la première moitié du XIXe siècle reproduite ci-dessous.

 

 

La ressemblance entre la voute ancienne et la voute qui nous intéresse est frappante. Elles sont cintrées, les dimensions semblent proches, les impostes sont saillantes… Or, en cet endroit le rempart fut démantelé en 1857 afin de construire un quai autour du nouveau pont. Il est fort probable que le propriétaire de la demeure accessible depuis la rue Maurice-Delamare ait fait partie des gens qui ont acheté à la Ville de Pont-de-l’Arche des pierres issues du démantèlement des fortifications. Il aura certainement acheté cette voute afin d’en faire un beau portail. Du mur de clôture, il reste quelques éléments, à droite d'une entrée de garage. Il s'agit d'un élégant damier de silex noirs et de moellons calcaires avec quelques chainages de pierre de taille.

C’est peut-être ce qui donne l’impression aux promeneurs et aux collégiens de traverser les siècles en passant sous cette belle voute… 

  

* Pour le vocabulaire architectural, consultez l’article « voute » de Wikipédia. 

 

Armand Launay

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20 juillet 2011 3 20 /07 /juillet /2011 10:42

-E.Charpillon, Louis-Étienne, Caresme, Anatole, Dictionnaire historique de toutes les communes du département de l’Eure, Les Andelys : Delcroix, 1868, 960 p., t. II, p. 662-674.       

 

PONT-DE-L'ARCHE

 

Paroisse : ch.-lieu de Baill., Vic. et Elec. – Dioc. d’Évreux. – Parl. et gén. de Rouen.

       Pont-de-ma-Citadelle, Pons arcis meae, d’où Pont-de-l’Arche, telle paraît être la véritable étymologie de cette localité[1].

         « Vers 860, Charles le Chauve convoqua les grands de l’Empire, à son palais de Pîtres, et obtint d’eux des subsides pour faire construite une fortification et un barrage assez fort pour arrêter les barques normandes qui remontaient la Seine. Pour établir ce pont, on choisit l’endroit où la marée cesse de se faire sentir ; deux châteaux-forts furent élevés aux deux extrémités, sous la direction de l’archevêque Hincmar.

 

         Vers 1020, le duc Richard II, duc de Normandie, donna aux moines de Jumièges l’église et le tonlieu de Pont-de-l’Arche, avec trois moulins qui existaient sous le pont, deux acres de près et un moulin vers les Damps, avec trois fermiers.

         Guillaume de Pont-de-l’Arche fut un des cinq enquêteurs chargés, par Henri 1er, en 1127, de la rédaction du rôle de Winchester.

         Vers 1180, l’impératrice Mathilde et son fils Henri II donnèrent à N.-Dame-du-Pré, 4 l. de rente à prendre sur les pêcheries de Pont-de-l’Arche.

         Richard Cœur-de-Lion échangea, en 1198, avec les seigneurs de Jumièges, le domaine de Pont-de-l’Arche contre celui de Conteville ; après la mort de son frère, Jean sans Terre ne pouvant défendre Pont-de-l’Arche, voulut démanteler le château ; Philippe Auguste ne lui en laissa pas le temps et s’en empara en 1203.

         Dans le traité fait avec les habitants de Rouen, le 1er juin 1204, il est dit que Philippe-Auguste leur accorde les mêmes libertés et coutumes que celles dont jouissaient les bourgeois de Pont-de-l’Arche ; il leur accorda, de plus, la franchise de péage à Pont-de-l’Arche.

        Pont-de-l’Arche a servi dans tous les sièges de Rouen de dépôt d’approvisionnements militaires ; cette ville, qui pouvait empêcher le trafic entre Paris et Rouen, a été pendant bien longtemps considérée comme la clef de la Haute-Normandie  ; aussi, Philippe-Auguste et ses successeurs y vinrent-ils souvent. Si la situation de cette ville était importante, au point de vue stratégique, elle ne l’était pas moins du point de vue fiscal ; le point extrême de la marée montante servait de ligne de démarcation pour les droits à percevoir par la vicomté de l’Eau.

      En 1211, Alexandre, abbé, et les religieux de Jumièges, abandonnèrent à Philippe-Auguste ce qu’ils avaient à Pont-de-l’Arche et reçurent Conteville en échange.

      On dressa, en 1213, un état des nefs appartenant au châtelain de Pont-de-l’Arche, Simon de Montfort étant à Pont-de-l’Arche ; fit hommage au roi des États de Raymond VII, comte de Toulouse, qui avait été déclaré hérétique (sic).

         Des actes nombreux de Philippe-Auguste sont datés de Pont-de-l’Arche.

         En 1222, le roi étant dans cette ville, donne aux bourgeois de Poitiers la liberté du commerce, excepté à Pacy et à Pont-de-l’Arche.

        Louis VIII se trouvant à Pont-de-l’Arche, le 4 janvier 1224, s’engage à faire venir à Rouen les débiteurs des bourgeois de cette ville[2] ; il autorisa les religieux de Bonport à faire venir chaque année 100 tonneaux de vin, francs de péage et de droits de coutume.

         Dans une charte de Guillaume de Tourville, pour Jumièges, en 1228, il est fait mention de la voie publique qui conduit du port d’Oissel à Pont-de-l’Arche[3], Me André était alors curé de cette ville.

         A la date de 1237, Pierre de Meulan était châtelain de Pont-de-l’Arche ; Me Robert était curé.

         Les assises tenues à Pont-de-l’Arche, en 1240, furent présidées par Jean des Vignes et Renault d’Alisay, vicomte de Pont-de-l’Arche.

         Jean Ansgaut qui avait pris part à la croisade, reçut du roi, en 1251, une rente de 3 d. sur la prévôté de Pont-de-l’Arche ; Robert Le Maçon, Abraham, Robert et Eudes du Pont-de-l’Arche, sont cités dans différentes chartes de cette époque.

         Pont-de-l’Arche faisait alors partie du domaine royal, et dans le compte des vins du roi, cette ville figure, en 1247, pour 88 muids 11 setiers ½ [4]. On y percevait un droit de péage de 10 d. par muid sur les vins qui passaient sous le pont, de même que les chevaux, bestiaux, voitures, traversant le pont, acquittaient un droit.

         Barthélemy Fergant était, en 1256, vicomte de Pont-de-l’Arche ; Guillaume des Gades-Renicourt l’avait remplacé trois ans après.

         Eudes Rigaut le vigilant, archevêque de Rouen, visita Pont-de-l’Arche cinquante-quatre fois ; il donna deux fois l’ordination dans la chapelle du château, et deux fois il assista à des ordinations faites par l’archevêque d’Évreux.

         En 1271, Robert du Pont-de-l’Arche vendit au Bec, pour 7** l. de rente des maisons qui lui rapportaient 12 d. de rente.

       Un arrêt du Parlement de la Toussaint 1288, décida que l’abbaye du Bec n’avait pas le privilège de libre circulation à Pont-de-l’Arche.

         Me Guillaume était, en 1288, recteur des économies de Pont-de-l’Arche ; Mgr Gohier, vicomte, fut choisi comme arbitre en 1289 ; il était remplacé deux ans plus tard par Robert d’Auvilliers.

         Une inondation emporta tous les ponts de la Seine , en 1296, à l’exception toutefois de celui de Pont-de-l’Arche.

         Pendant le XIIIe siècle on faisait, à Pont-de-l’Arche, un grand commerce d’huile de noix et d’huile de pavot, que l’on extrayait dans le pays.

         Le bailli de Rouen voulant soustraire au sieur Nicolas Le Tonnelier un privilège de la Fierte , l’envoya, en 1302, aux prisons de Pont-de-l’Arche.

         En 1306, Jean de Préaux vendit aux religieux de Saint-Ouen une arche du pont de Pont-de-l’Arche avec la pêche de cette arche, qui étaient de son propre héritage[5].

         Un sieur Jean Larchevêque tenait en fief-ferme, à la date de 1308, les moulins du roi de Pont-de-l’Arche ; l’année suivante, le roi confirma une vente, consentie par Laurent Thiart, vicomte de Pont-de-l’Arche, au cardinal Jean Le Moine[6].

         C’est à Pont-de-l’Arche que fut tenu, en 1310, le concile dans lequel les Templiers furent condamnés à mort.

         Aux assises tenues dans cette ville en 1313, on confirma les arrangements entre le Bec et le seigneur du Neubourg pour les Novales ; d’autres assises furent tenues, en 1313, où fut jugé un différend entre l’abbaye du Bec et Guillaume de Maulévrier, seigneur de Combon.

         Des lettres de Louis le Hutin, du mois de juillet 1315, fixèrent le tarif des droits à payer sur les marchandises voiturées par eau, de Paris à Pont-de-l’Arche, et de cette dernière ville jusqu’à la mer, tant en montant qu’en descendant ; il en résulte que le roi percevait 10 d. par tonneau de cidre remontant la Seine jusqu’à Pont-de-l’Arche[7].

         Une ordonnance de Philippe le Long, du 12 mars 1316, chargea le bailli de Rouen « d’établir ès ville de Pont-de-l’Arche un capitaine… qui fasse serment de maintenir et garder loyaument icelle ville, païs et peuple ».

         En 1317, Pierre Lhôpital, prêtre, était garde du scel aux obligations de Pont-de-l’Arche[8]. Jean de Neufchâtel était vicomte.

         Jean Gougeul obtint du roi Charles le Bel, en 1321, que le moulins Aux Dames, à Pont-de-l’Arche, serait tenu du roi à seule foi. En 1335, Robert Garin, vicomte de Pont-de-l’Arche, résista aux injonctions du roi, relatives à l’exécution d’une sentence rendue par la Chambre des Comptes de Paris, au sujet de biens situés à Léry.

         Jean du Bosc, vicomte de Pont-de-l’Arche, assistait à l’échiquier de 1344 ; il épousa Catherine de la Luzerne , dont il eut quatre enfants.

         Par quittance passé devant Pierre Martel, garde du scel aux obligations de la vicomté de Pont-de-l’Arche ; le 6 novembre 1350, Jehan le Fer déclara avoir reçu du roi par les mains de N.H. Bachelet, vicomte, 20 s. pour le terme de Saint-Michel passé.

         Au commencement du mois d’août 1346, les Anglais, appelés par Charles le Mauvais, débarquèrent en France sous la conduite de leur roi Edouard, et vinrent à Pont-de-l’Arche qu’ils brûlèrent ainsi que tout le pays voisin[9].

         L’année suivante, Richard du Mesnil, chevalier, était capitaine du château de Pont-de-l’Arche.

         Des lettres royales, du 13 avril 1350, constatent que le comte d’Harcourt devait au roi Jean le Bon, 220 l., 8 s. payables au vicomte de Pont-de-l’Arche. A cette date, le vicomte était Jean de Baigneux, qui eut pour successeur Richard de Bitot.

         En 1356 « se partit le roi Jean de Rouen, et alla au Pont-de-l’Arche, et la vient à lui le prévôt des marchands de Paris, à 500 hommes d’armes »[10].

         Au mois d’août de l’année suivante, Charles, duc de Normandie, était à Pont-de-l’Arche. Après la paix de Brétigny, en 1360, le roi Édouard fit passer la Seine à ses troupes, à Pont-de-l’Arche, d’où il les envoya en Angleterre[11].

         De grandes réparations furent faites au XIVe siècle, au château de Pont-de-l’Arche, à la chambre du roi, au colombier et à la petite chapelle.

         La veille de la bataille de Cocherel, le 15 mai 1364, du Guesclin était à Pont-de-l’Arche, où ses troupes se reposèrent et où il les passa en revue ; le même jour, le captal de Buch mal averti des mouvements de son adversaire, se dirigea vers Pont-de-l’Arche pour s’opposer au passage de la Seine[12].

         Le soir de la bataille, l’armée française, victorieuse, arriva à Pont-de-l’Arche, ramenant Jean Joël et Pierre Sacquainville, prisonniers ; ils mouraient de faim et même les plus vantés.

         En 1369, Robert Hallé était vicomte de Pont-de-l’Arche ; Jean de Jeucourt était capitaine ; on assigna, à ce dernier, un revenu de 400 l. ; il était remplacé l’année suivante par Henri de Ferrières, seigneur de Gisors.

         Un impôt sur les vins fut mis à Pont-de-l’Arche, en 1375 ; vers cette époque, Hue de Neaufles était garde du scel de la vicomté, Jean de la Heruppe , huissier d’armes, était capitaine du Pont-de-l’Arche.

         Le 11 juillet 1382, Jehan Auber, vicomte de Pont-de-l’Arche, avait pour lieutenant Guillaume Ango ; l’année suivante, il avait un conflit avec la juridiction de l’archevêque de Rouen, à Louviers ; Colard d’Estouteville était capitaine.

         En janvier 1387 eut lieu, à Pont-de-l’Arche, la vente du manoir de messire Bonneau de Jeucourt, chevalier.

         Le 25 mars 1381, Charles VI étant à Pont-de-l’Arche, après son sacre, fit grâce à Jehan Pesquez, qui fit mis en liberté le carême et en partit le samedi saint, pour aller à Rouen.

         Les assises tenues à Pont-de-l’Arche, en 1388, furent présidées par Richard de Houdetot, bailli de Rouen.

         Moradas de Rouville était, en 1390, capitaine du château de Pont-de-l’Arche : Jehan de la Mare , vicomte ; ce dernier était remplacé, en 1398, par Jean de Saint-Ouen ; Isembart Ravenel, garde des sceaux des obligations de la vicomté, figure dans les contrats, en 1397.

         À la fin du XIVe siècle, Guillaume Blanc-Baston, lieutenant général de la Thuille , bailli de Rouen et de Gisors, présida les assises de Pont-de-l’Arche.

         En 1406, Guillaume Le Diacre, vicomte de Pont-de-l’Arche, acheta de Jean Grouchy, seigneur de Monterolier, le fief Duredent.

         Jean Monnet était vicomte, en 1408, lorsque le bailli de Rouen, aux assises de Pont-de-l’Arche, condamna un porc à être pendu pour avoir tué un enfant ; la même année, Jean de Villeneuve était lieutenant général auprès du bailli de Rouen.

         Après le meurtre de Raoul de Gaucourt, bailli de Rouen, en 1417, « le dauphin partant de Paris, atout 2,000 combatants, ala au Pont-de-l’Arche, duquel lieu il envoya l’arcevesque, Louis de haucourt, pour exhorter les bourgeois de Rouen à obeir au dit daulphin »[13].

         Au mois de juin 1418, le roi Henri d’Angleterre quitta Lisors pour venir assiéger Pont-de-l’Arche.

         « En ce temps estoit le roy d’Engleterre tenant le siége de Pont-de-l’Arche, que tenoient les Armignacs, et en estoit le seigneur de Graville, cappitaine, lequel ne tint pas longuement, mais le rendy par traictié aus Engloix, et s’en party saulvement »[14].

         Le siège avait duré trois semaines.

         Peu de jours après la prise de la ville, le roi de France envoya des ambassadeurs qui vinrent au Pont-de-l’Arche pour traiter des conditions de la paix. « Et s’en partirent sans rien faire ».

En 1419, alors que les Anglais étaient maîtres de la ville, Ouin Huchère était vicomte, Maurice Brun, capitaine ; Robinet Grouys, marinier au Pont-de-l’Arche, avait l’office d’amener et de ramener toutes les nefs dessous le pont, que tenait Amaury-le-Coq.

Le roi d’Angleterre se trouvant à Pont-de-l’Arche, 1419, accorda au prieur de Bonport des lettres de sauf-conduit ; l’année suivante, il ordonna la restitution du temporel au couvent.

Le 26 février 1421, Thomas Maisterson était capitaine de Pont-de-l’Arche ; mais l’année suivante, il avait pour successeur Jean Beauchamp, qui fut passé en revue avec sa troupe, par les commissaires du roi d’Angleterre. Cette même année, le 8 octobre, une ordonnance contre les soldats qui avaient déserté leur corps, fut adressé au chevalier Jean Kigley, bailli de Rouen, et à Guillaume Crafford, esc., lieutenant du même bailli et capitaine de Pont-de-l’Arche ; au mois d’avril précédent, Maurice Brun avait été nommé capitaine du château et de la ville de Pont-de-l’Arche.

Après la prise de Verneuil, en 1424, le régent revint en Normandie, et ramena ses prisonniers à Pont-de-l’Arche : Philippe Le Baube était alors receveur des quatrièmes.

En 1424, Jean Falstaff, grand-maître d’hôtel du roi d’Angleterre, fut nommé gouverneur de Pont-de-l’Arche, Caen etc.

Guillaume du Fay, esc., époux de Jeanne de Recuchon était, en 1426, vicomte de Pont-de-l’Arche ; Jean Aubert l’avait remplacé dans cette fonction en 1428 ; la même année, la garde du scel des obligations de la vicomté appartenaient à Constant Pinchon[15] ; Jean Delestre, clerc, était tabellion juré.

Au mois de juillet 1429, après une inspection au château de Pont-de-l’Arche, on renforça la garnison ; en 1430, le sire de Willughby était capitaine de ce château ; il eut pour successeur, en 1435, Bérard ou Bertrand de Montferrand.

Les États de Normandie furent tenus à Pont-de-l’Arche en 1432, 1437, 1438 et 1439.

En 1435, le pont était en fort mauvais état, et les Anglais furent obligés de le réparer.

           Richard de Tharnes était, en 1437, lieutenant de la ville de Pont-de-l’Arche ; aux Etats tenus à Rouen, cette même année, Brunet de Longchamp, chevalier, représentait la noblesse de la vicomté de Pont-de-l’Arche.

Le 30 novembre 1440, Henri IV réunit à Pont-de-l’Arche une assemblée des notables habitants de la ville et des environs, pour viser au moyen d’arrêter les entreprises des ennemis (les Français), qui s’étaient déjà emparés de Louviers. Adam Hilton était alors lieutenant au Pont-de-l’Arche, de l’archevêque de Rouen ; il était capitaine en 1412.

Au mois de septembre 1441, le roi Charles VII fit expédier des titres de noblesse à Jean Bocquet, né à Rouen, et habitué à Pont-de-l’Arche, pour avoir fait des actions d’éclat au siège de Pontoise, et être monté le premier à l’assaut ; il lui donna pour armoiries : d’or à trois tours d’azur.

Deux bourgeois, Pierre Mordret et Jean Roisse, représentaient Pont-de-l’Arche aux Etats de Rouen, du 20 avril 1447 ; Jean Hamon donna quittance le 12 décembre 1448 à Jean Lancelin, vicomte de Pont-de-l’Arche.

Cependant, Pierre de Brézé, capitaine de Louviers, Robert de Flocques et d’autres capitaines français, résolurent de s’emparer de Pont-de-l’Arche ; un marchand de Louviers, que son commerce appelait à Rouen et que tout le monde connaissait, leur en ouvrit les portes, pendant la nuit du 13 mai 1449. Les Anglais, surpris dans leur sommeil, furent presque tous faits prisonniers.

Le butin des vainqueurs fut considérable. C’était un premier échec à la puissance des Anglais, qui allaient bientôt disparaître du royaume de France.

Guillaume de Bailleul, seigneur de Beauvais, vint aussitôt trouver Charles VII à Pont-de-l’Arche pour lui prêter serment de fidélité. Il y eut la même année des conférences pour traiter de la paix ; le roi de France offrit de rendre Pont-de-l’Arche, Conches et Gerberoy aux Anglais, si l’on rendait Fougères au duc de Bretagne. Les ambassadeurs ne purent s’entendre[16].

Jean Langlois était, en 1450, lieutenant en la vicomté de Pont-de-l’Arche. Le 1er mai 1461, quittance fut donnée à Pierre Bachelet, vicomte.

En 1462, le roi Louis XI étant en Normandie, imposa un droit sur les vins qui passaient sous le pont de Pont-de-l’Arche et descendaient à Rouen.

Charles, frère de Louis XI, ayant reçu, en 1465, la Normandie en apanage, voulut aller en prendre possession ; mais arrivé à Pont-de-l’Arche, il y fut retenu par les intrigues et les artifices des Bretons, qui voulurent s’emparer de sa personne, lors de son entrée à Rouen ; mais leurs projets furent déjoués par le comte Jean d’Harcourt[17].

Louviers, qui était entré dans la Ligue du Bien Public, vint mettre le siège devant Pont-de-l’Arche qui lui fermait le passage pour aller à Rouen ; après un siège de quelques jours, le château capitula, le 11 janvier 1466. Le 3 février suivant, Gauvain Mauviel, lieutenant général du bailli de Rouen, ayant été fait prisonnier, fut amené à Pont-de-l’Arche ; on dressa un échafaud sur le pont, le sieur Mauvel fut décapité, sa tête fut mise au bout d’une pique et son corps jeté à l’eau[18].

Sur les ordres du roi, un camp pour 20,000 hommes, entouré de fosses et de palissades, fut formé dans la vallée entre Pont-de-l’Arche et Pont-Saint-Pierre ; pour en payer les frais il imposa une taille très lourde ; Guillaume Picard, bailli de Rouen, commandait ce camp.

Un matelot ayant été tué à Pont-de-l’Arche, en 1467, par Guillaume Beslatre, celui-ci eut la vie sauve en levant la fierté.

Par contrat passé devant les tabellions au siège de Léry, en 1471, Pierre Martel, garde des scel des obligations de la vicomté de Pont-de-l’Arche, donna à fief 3 vergées de terre pour 3 s. de rente.

Le 28 octobre 1472, Louis XI rétablit, au profit des manants et habitants de la vicomté de Pont-de-l’Arche, le grenier à sel établi à Pont-de-l’Arche par Charles VII, qui l’avait ensuite abolit.

Le 15 mars 1475, Richard Bachelet était lieutenant général de N.H. du Gué, vicomte de Pont-de-l’Arche du bailli de Rouen ; Guillaume Gautier et Pierre Ducloz étaient, en 1483, tabellions royaux.

Des lettres de Charles VIII, données à Pont-de-l’Arche le 14 avril 1483, octroyent congé général à tous les français ayant cause et procès à l’Échiquier, d’appointer sans amende.

Le 7 octobre 1500, Jehan Chalenge, vicomte de Pont-de-l’Arche, avait pour lieutenant général Guillaume Becquet ; il fut remplacé, en 1518, par son fils Jacques, devant lequel eut lieu, le 12 juin 1524, le traité de mariage de Hector Vipart avec Marguerite d’Amfreville.

A ce moment, Me Roger Le Mercier était procureur substitut du roi en la vicomté.

Deux ans après, en 1526, Me Martin d’Escambosc, advocat du roi à Louviers, était vicomte de Pont-de-l’Arche.

La succession de Simon de Baigneux, vicomte de Pont-de-l’Arche, en 1531, passa à la famille royale de Dreux.

En 1534, Pierre de la Faye , grainetier du Pont-de-l’Arche, demanda délai pour vérifier sa noblesse.

Une sentence du 26 juin 1537, rendue par Jean Sergent, vicomte de Pont-de-l’Arche, adjuge une pièce de terre, sise au Bec-Thomas, à Robert Le Comte de la Harangère ; Robert de Pommereuil était alors capitaine de cette ville ; le scel de la vicomté était tenu par Binot d’Arthois.

En 1540, François 1er étant à Pont-de-l’Arche, donne les injonctions au Parlement de Rouen.

Un aveu rendu au roi, pour la baronnie d’Elbeuf, le 6 août 1542, contient cette mention : « Nous appartient la rivière de Saine, depuis l’ombre du pont de Pont-de-l’Arche à l’heure du soleil de midy, jusqu’au gravier au-dessous d’Orival »[19].

Adam de la Basoge , haut justicier de Heuqueville, avait droit de pêche depuis le Blanc-Saulx jusqu’au talus de Pont-de-l’Arche, par moitié avec l’abbaye de Bonport et autres ayant-droit.

Quelques années après, en 1546, les États de Normandie se réunirent à Pont-de-l’Arche, à cause de la peste qui sévissait à Rouen.

Thomas Cyroie était, en 1555, avocat du roi aux juridictions de Pont-de-l’Arche ; en 1561, Loys de la Faye , esc., licencié ès-lois, était lieutenant du bailli de Rouen.

Les protestants venus de Rouen au nombre de 1,500 avec 6 pièces d’artillerie, se présentèrent devant Pont-de-l’Arche, en 1562, espérant y faire un grand butin ; mais ils ne purent y pénétrer ; les capitaines Guyon et Maze les repoussèrent vivement, en leur faisant subir des pertes cruelles ; 40 soldats furent rués ou blessés[20].

Par lettres patentes datées de Plessis-les-Tours, le 10 octobre 1569, le roi Charles IX donna à Catherine de Médicis, sa mère, la vicomté de Pont-de-l’Arche. A cette époque, Jean de Carvoisin, seigneur d’Achey, gouverneur de Pont-de-l’Arche, épousa Marguerite de l’Isle.

Guillaume Jobin vendit, en 1580, à Charles Routier, grenetier du grenier à sel de la vicomté, par contrat passé devant Louis Trencheur, notaire royal, une vergée de vigne au Val-au-Queu, à Amfreville.

Vers cette date, Nicolas Hesbert, advocat, avait la garde du scel aux obligations de la vicomté.

Dans un aveu de 1581, le seigneur du Portpinché déclarait posséder quatre arches du pont, avec un droit de pêche de tous le poisson. Le droit de bac de Pont-de-l’Arche à Lormaye appartenait à l’abbaye de Bonport.

Aux États de Normandie tenus à Rouen, en 1582, Me Nicolas Le Blanc, advocat de Pont-de-l’Arche, représentait la justice de la vicomté ; Jean Hays était son lieutenant ; Jean Fournière, Guillaume Hays et Pierre Morlet, advocats, y comparurent également.

La coutume locale de Pont-de-l’Arche concernant l’apport en mariage de la femme, fut abrogée le 5 janvier 1583, par le président du Parlement assisté d’un conseiller et d’un avocat du roi, en présence et du consentement des gens des trois États, à ce convoqués[21].

Deux ans après, en 1589, Le Blanc du Rollet, gouverneur de Pont-de-l’Arche, en ouvrit les portes à Henri IV et l’on assure qu’à dater de cette époque, les armes de cette ville s’enrichirent de trois fleurs de lys d’or.

Pont-de-l’Arche portait : de sable au pont d’argent maçonné de sable, au chef cousu d’azur chargé de trois fleurs de lys d’or.

En 1592, Henri IV établit son quartier général à Louviers et cantonna une partie de ses troupes à Pont-de-l’Arche ; c’est là qu’il envoya les canons qu’il avait employés au siège de Rouen, lorsqu’il fut forcé de le lever[1]. Rouen était défendu par l’amiral de Brancas, lieutenant général pour le roi aux bailliage de Rouen, de Caen et de Pont-de-l’Arche.

Chicot, le fou de Henri IV, que la plume de notre ami, le grand romancier Alex. Dumas, a rendu célèbre, ayant été blessé dans une escarmouche, mourut à Pont-de-l’Arche où il fut inhumé.

En 1594, M.Claude des Hays était curé de Pont-de-l’Arche, Claude Boullenger et Jean Lemercier, avocats du roi en la vicomté. La même année, Jacques Bachelier, receveur des tailles, obtint la remise de 8,000 écus des deniers de sa recette, et don de 6,000 écus pour la perte de ses meilleurs meubles, le tout volé sur le chemin de Louviers où il les envoyait après la surprise de Pont-de-l’Arche.

Des travaux de charpente à l’arche du Diguet, au pont de Pont-de-l’Arche, furent entrepris en 1596, par Geofroy Gigault, maître charpentier de Rouen. La même année, le marquis de Rosny prescrivit d’informer les excès et outrages commis sur la personne de Jacques Le Brasseur, maître serrurier adjudicataire des travaux à faire à ce pont. Une assiette de 1,000 écus dut mise sur Pont-de-l’Arche, pour fournir l’indemnité due au propriétaire de deux maisons du faubourg, démolies par ordre du gouverneur du Rollet.

En 1597, décharge fut accordée à Pont-de-l’Arche où la peste régnait depuis 1595. Le roi ne voulut pas accueillir la supplique des Etats de Normandie, assemblés en 1598, qui demandaient la démolition du château de Pont-de-l’Arche.

En 1599, Villars était gouverneur du Hâvre et de Pont-de-l’Arche.

Au commencement du XVIIe siècle, les principaux fonctionnaires civils et militaires de la vicomté de Pont-de-l’Arche étaient : David Cabeuil, lieutenant particulier du bailli de Rouen ; Charles de la Vache, receveur du roi ; Tannaguy, baron de Chambray, gouverneur ; Jehan Le Sergent, vicomte ; Noel Pappeil et Thomas Liard, tabellions.

Vers 1615, Jacques Routier fut nommé assesseur criminel en la vicomté de Pont-de-l’Arche. L’année suivante, le maréchal d’Ancre se fit donner le gouvernement de cette ville dont il augmenta les fortifications ; après sa port, le duc de Luynes lui succéda à Pont-de-l’Arche.

Pierre Perrier, avocat au Parlement et lieutenant général en la vicomté, rendit aveu, en 1616, pour une île nommée la Haye Auberée.

La même année, Charles Duval, conseiller au Pont-de-l’Arche, fournit aveu pour 100 perches de terre en l’île Dehors ; David Cabeuil avait la charge de lieutenant général du bailli de Rouen.

Le roi accorda, en 1619, à la garnison de Pont-de-l’Arche, son chauffage à prendre dans la forêt de Bord.

La même année, Me Langlois était président à l’élection de Rouen.

En 1620, Jean-Baptiste d’Ornano, maréchal de France, avait pour lieutenant colonel et commandant en son absence à Pont-de-l’Arche, un capitaine du nom de Francesque.

A partir de son entrée au conseil en 1623, le pouvoir de Richelieu n’eut plus de bornes. Le cardinal se fit bientôt accorder le gouvernement de Pont-de-l’Arche ; son lieutenant, dans cette ville, était en 1624, François de Rotundy, sieur de Cahusac. La même année, Jean Bachelet fut nommé maître des ouvrages à voyer pour le roi, en la vicomté, et on répara les couvertures des logis du roi, ainsi que la chapelle du château.

De 1628 à 1630, Pierre-Claude Behote et Jean-Baptiste des Marets étaient élus en l’élection de Pont-de-l’Arche ; Routier en était président ; Charles Le Sergent, esc., sieur de la Coudraye, était garde hérédital du scel ; Adrien Guéroult, procureur du roi aux eaux et forêts de Pont-de-l’Arche.

Jean de Lonlay, sieur de St-Georges, commandait la ville et le château de Pont-de-l’Arche pour le cardinal de Richelieu, de 1636 à 1640. Dans ce laps de temps, messire Charles Pinel était élu assesseur ; Jean Langlois, lieutenant général criminel ; Pierre Maille, conseiller du roi, élu, puis commis à la recette des tailles en l’élection ; Charles Maille, contrôleur héréditaire ; Samson Gilles, contrôleur, et Groult, procureur du roi aux eaux et forêts de la vicomté ; Pierre du Bosc, contrôleur du grenier à sel.

Le 1er janvier 1640, le chancelier Seguier visita le château de Pont-de-l’Arche et se rendit compte des réparations à y faire ; la même années, les sieurs Fleury Perrot, maître maçon, et Adrien Petit, architecte du duc d’Orléans, se rendirent adjudicataires des travaux du pont, et ils employèrent à cet ouvrage les matériaux provenant de la démolition de l’ancien.

Richelieu ayant appris que de nombreuses exactions étaient commises sur les vins qui passaient à Pont-de-l’Arche, destitua le gouverneur Jean de Lonlay qui y avait pris part, et le remplaça par le sieur Le Normand, sire de Beaumont.

Le 21 mai 1643, Me Antoine Routier était lieutenant général criminel au siège de Pont-de-l’Arche.

Pendant les troubles de la Fronde, le duc d’Harcourt qui tenait le parti du roi, n’ayant pas pu s’emparer de Rouen, se retira au Pont-de-l’Arche où le sire de Beaumont le reçut à bras ouverts.

Harcourt qui vint au Pont-de-l’Arche,

Monté sur un cheval rouan

Sans avoir entré dans Rouen.

Lors des conférences de St-Germain, le prince de Condé exigea que Pont-de-l’Arche fût remis au duc de Longueville comme place de sûreté ; le duc la mit aussitôt en état de soutenir un siège et lui donna pour capitaine de baron de Chamboy, lieutenant de ses gendarmes.

A ce moment, Pierre Maille, Etienne du Boullé étaient élus en l’Election. Jehan Langlois était président, il fut remplacé, en 1651, par son fils Pierre Robert.

Louis Cousin avait été reçu, en 1650, lieutenant particulier au bailliage. De nombreuses démarches furent faites, à cette époque, pour obtenir la démolition du château de Pont-de-l’Arche ; mais ce fut sans aucun résultat.

Le 17 mai 1656, un arrêt du conseil d’état, exempte l’abbaye de Jumièges de tous droits pour le passage des vins et autres provisions passant par la Seine et villes de Pont-de-l’Arche, Rouen, etc. en conséquence de l’échange fait avec le roi Philippe-Auguste.

En 1659, Nicolas de la Croix était lieutenant criminel en la vicomté ; François Bréant était procureur du roi. Quelques années après, en 1688, S.A. Emmanuel Théodore de la Tour d’Auvergne, duc d’Albret, abbé de St-Ouen, donna aux Jésuites de Rouen, un moulin à blé, sous une des arches du Pont-de-l’Arche ; Jean-Baptiste Vallée, sieur du Parc, était alors lieutenant particulier, ancien civil et criminel du bailli de Rouen au Pont-de-l’Arche, il était lieutenant général du bailliage, en 1675.

En 1671, André Druel avait remplacé Charles de Tesson, esc., comme gouverneur de Pont-de-l’Arche, Jean-Baptiste du Parc était lieutenant général en la vicomté.

En 1674, Vallée, conseiller du roi, avait la charge de lieutenant général particulier ancien civil au siège royal du Pont-de-l’Arche ; Nicolas Langlois fut nommé, en 1676, lieutenant général, ancien au même siège. Quelques années après, Michel Leforestier était lieutenant général de Police ; François Bréant était substitut du procureur du roi.

Le 3 février 1687, les plaids de la vicomté furent tenus par Jean Routier, conseiller du roi, vicomte ; Charles Le Camus était avocat aux saisies réelles.

En 1600, MM. Jacques et Thomas Bourdon ayant essayé d’établir une manufacture de draps, les drapiers de Louviers y firent une vive opposition.

Charles Auzou était, en 1674, élu en l’Election. Me Claude Lobras était chapelain de la chapelle St-Etienne au château de Pont-de-l’Arche ; Jean Le Cordier était receveur des tailles.

Th. Corneille fait de Pont-de-l’Arche, au début du XVIIIe, la description suivante : « Vicomté, bailliage, élection, grenier à sel, maîtrise des eaux et forêts, et un bon château de l’autre côté de son pont de pierre, qui est le plus beau, le long, le mieux bâti qui soit sur la Seine.

« Son château, bâti dans une petite île, est de figure carrée, bien entretenu, bien logeable, flanqué de quatre tours ; au-dedans, il y en a une fort haute qui sert de donjon. Ce château est séparé de la prairie par deux petits ponts.

Cependant un procès-verbal, dressé en 1712, constatait que ce pont si bien bâti menaçait ruine, que la navigation était entravée par les pêcheurs et les gords.

Le 30 mars 1719, ce qu’on appelait les petits domaines de Pont-de-l’Arche consistant en droits de halle, minage, droits de travers qui se paient par les bateaux et charrette passant sur le pont, droit de vieil acquis payé par les bateaux sous le pont, le gord, et le bas de Léry furent donnés à titre d’engagement à Julien Langlois de Villeneuve, qui donna le tout à bail, moyennant 8,300 l. par an.

Malgré l’opposition des gens de Louviers, la manufacture de draps avait prospéré, Piganiol de la Force écrivait en 1722 : « La manufacture du Pont-de-l’Arche où il se fabrique des draps très-fins, façon d’Angleterre, est très estimée ; mais elle n’est composée que de six ou sept métiers. Les filages sont conduits par des fileurs et des fileuses de Hollande ».

Pendant le XVIIIe siècle, nous trouvons à Pont-de-l’Arche les fonctionnaires civils et militaires ci-après : Farouil de Bondeville, le marquis de St-Pons, Charles-François de Campion, M. Routier et le baron Larchier de Courcelles, gouverneurs, Nicolas Langlois, seigneur de Criquebeuf-la-Campagne, Pierre Le Massif, Dagoumer, lieutenants généraux et particuliers civils et criminels du bailli de Rouen ; Nicolas Le Cornu, lieutenant particulier du bailli de Rouen, Jean Routier, Henri de la Couture du Chien, prêtre-curé de St-Vigor, vicomtes ; Clément Aubert, François Aubert, Housard de la Poterie, présidents en l’élection ; Claude Martin, François Bigot, Jacques Pétion, Adrien Longuet, élus ; Pierre Morin, procureur du roi en l’élection ; Louis de Tesson, contrôleur des grands entrées ; Ducroc de Biville, greffier en chef du bailliage ; Jacques Vallée, greffier en chef aux eaux et forêts ; Le Cordier de Bugenval, receveur des tailles ; Mathieu Cavelet, notaire, receveur au grenier à sel.

Par un édit de 1772, la vicomté fut réunie au bailliage.

En 1784, Pont-de-l’Arche payait 2,326 l. de taille, 1,380 l. d’accessoires et 1,489 l. de capitation.

Les droits de la vicomté de l’Eau de Rouen ayant été acquis en 1718, par le prince de Condé, à titre d’engagement, la famille de ce prince entretint à Pont-de-l’Arche, jusqu’à la Révolution, un agent chargé de la surveillance de ses intérêts dans cette ville.

L’ancien pont bâti du temps de Charles le Chauve, condamné par les ponts-et-chaussées, a disparu le 12 juillet 1856.

L’église de Pont-de-l’Arche remonte au XVe siècle, elle a été bâtie sur l’emplacement d’une plus ancienne, sur un petit mamelon ; elle est remarquable par ses pendentifs, ses fonts baptismaux dont les sculptures sont attribuées à Jean Goujon, par son orgue présent, dit-on, de Henri IV, par son retable à colonnes torses et enfin par ses magnifiques vitraux.

Léproserie. Cet établissement existait en 1259, et se trouve mentionné dans une charte de l’époque ; il est probable que c’est la même maison que le Bel-Air cité en 1265.

Prieuré. Il existait autrefois à Pont-de-l’Arche un prieuré dont les bâtiments ont été convertis en un hospice établi par lettres patentes de 1704.

Bernardines. Ce couvent fut fondé, le 6 décembre 1634, sous le nom de St-Antoine par Antoine de Montenay et Marguerite du Gué, sa femme, qui le dotèrent d’une ferme de 62 acres. Marguerite Cousin paraît en avoir été la première supérieure. Parmi les autres religieuses qui ont résidé dans cette maison, nous citerons : Madame de Bellemare, Marie et Charlotte de Clinchamp, Antoinette de Mornay et Marguerite du Four.

Vers le milieu du XVIIIe siècle, les Bénédictines ayant été transférées à Rouen, faubourg Bouvreuil, vendirent leurs bâtiments de Pont-de-l’Arche à sœur Maire des Anges d’Epinay, pour y établir des Ursulines.

 

Hommes remarquables

Un GUILLAUME DE PONT-DE-L’ARCHE avait été gardien du trésor de Westminster au moment de la mort de Guillaume le Conquérant.

Un autre GUILLAUME DE PONT-DE-L’ARCHE devint évêque de Lisieux ; c’est lui fonda les dominicains de cette ville. Se sentant vieux et infirme, il se démit de son évêché, le 6 mars 1250, entre les mains de l’archevêque de Rouen ; cinq mois plus tard, il rendait son âme à Dieu.

GUILLAUME DE PONT-DE-L’ARCHE, neveu du précédent, était, en 1261, doyen de Lisieux ; vers la fin de sa vie, il se retira dans l’abbaye de Bonport, où il mourut en 1338.

PIERRE MARTIN, moine de Bonport, se distingua dans les concours des Palinods.

PHILIPPE CAVELIER, moine de la même maison, est l’auteur du Tombeau d’Elisabeth de Bigards, abbesse de Fontaine-Guérard.

EUSTACHE-HYACINTHE LANGLOIS, né à Pont-de-l’Arche, le 13 août 1777, fut tout à la fois dessinateur, peintre, grand antiquaire et littérateur de mérite ; il mourut le 20 août 1837.

 

Fiefs :

1er LE BOSC. En 1180, Richard du Bosc devait 20 s. pour une transaction.

Au milieu du XVIIIe siècle, le Bosc était un plein fief, possédé par M. de Boncourt, président au bureau des finances de Rouen, qui l’avait transmis à son fils en 1780 ;

2e JEUCOURT appartenait au XIVe siècle, à une famille de ce nom ; messire Bonneau de Jeucourt, chevalier, vendit son manoir au mois de janvier 1387.

En 1780, M. Langlois de Criquebeuf était seigneur de Jeucourt.

3e LE PARC-ROYAL, appelé vulgairement le fief et manoir du Parc-Royal, relevant du roi, appartenant de 1676 à 1722 au sieur Sorel, dont le fils vendit le 30 juillet 1749 ;

4e SERGENTERIE DE BEDANNE. Ce fief était tombé en garde ès mains du roi, en 1499 ; il appartenait, en 1759, à un Bertrand de St-Jouen, maître des comptes de Rouen, aux droits de sa femme. En 1780, Louise de Boncourt l’avait transmis au sieur de Pontraincourt, son mari, et la même année il fut réuni à Martot.

5e SERGENTERIE DU PLAID-DE-L’EPEE. On a des lettres de Charles V, en date de 1321, pour Thomas de Bos-Guillaume, sergent fieffé du plaid de l’Epée à Pont-de-l’Arche.

Le 28 juillet 1418, Pierre Le Gay fut nommé sergent de Pont-de-l’Arche. Le même jour, le roi étant à Pont-de-l’Arche, accorda à ses chers Pierre Le Hay et David Hallebout, son frère, les héritages de Guillaume Brisquet, qualifié de rebelle, à cause de son attachement à Charles VII.

En 1679, Madeleine Labbé, héritière de Charles, donna aveu au roi de la châtellenie de Martot, de la châtellenie noble de Pont-de-l’Arche etc.

Nicolas Caresme était, en 1702, sergent royal ; il avait pour successeur, en 1712, Thomas Osmont.

Cette sergenterie dut achetée de Etienne Bosquier, par contrat du 23 août 1740, par Pierre Ferté, qui la vendit le 1er décembre 1780, moyennant 1,100 l. à Charles de la Vigne.

 

FORET DE BORD

Cette forêt mérite une mention spéciale, puisque c’est à cause d’elle qu’une maîtrise particulière des eaux et forêts avait été créée au Pont-de-l’Arche.

Vers 1230, Raoul de Criquebeuf et Richard du Val, tenaient dans la forêt de Bord, 3 vergées et ¾ de vergée pour 12 s. 9 d. de rente ; un sieur Gautier qui les mesura, eut un repas de 30 convives, qui coûta 30 s.

En 1327, Jean de Commeny, Jean de Vilaines, Jean de Guinemaut et Gaufroy Le Grieu étaient gardes en la forêt de Bord.

Le roi d’Angleterre étant à Pont-de-l’Arche, en 1418, donna l’office de verdier de la forêt de Bord, à Etienne Louvel, et nomma sergents de cette même forêt, Robin Le Tailleur, Jean Aubrée, Thomas Foucault et Simon de Daubeuf.

L’année suivante, Robert Donneux fut nommé par Henri V à une sergenterie de la forêt de Bord.

Le 20 novembre 1450, Jehan Farouil, esc., verdier, donna quittance de 20 l. 4 s.

Guillaume Adam fut nommé sergent de la forêt en 1471.

Vers 1508, le procureur du roi de Pont-de-l’Arche fit dresser une nouvelle carte de la forêt de Bord ; on lui présenta une demi douzaine de lapins, estimés 45 s. parce qu’il faisait un banquet. Le repas eut lieu à l’hôtel de la Tête noire.

En 1613, Jean Le Tellier, sieur des Hauguettes, était maître particulier aux Eaux et Forêts de Pont-de-l’Arche ; Louis de la Faye était lieutenant.

Me Jean Boquet, maître particulier des Eaux et Forêts de Pont-de-l’Arche, avait épousé une fille de Pierre Le Guerchois, avec lequel il plaidait au Parlement, en 1614.

Le 18 décembre 1641, le greffe de la maîtrise des Eaux et Forêts, et l’office du greffier alternatif, furent adjugés à Claude de Lux. Pierre de Marbeuf était maître des Eaux et Forêts. Le sieur Groult était procureur du roi.

En 1612, le duc d’Elbeuf et ses hoirs furent gratifiés par le roi, de la jouissance pendant 20 ans, de ce qui revenait à sa Majesté, dans les ventes et coupes ordinaires des forêts de la Londe, Pont-de-l’Arche, etc.

En 1679, la forêt de Bord se divisait en : garde de Criquebeuf, 3 triages, garde de Testeley, 2 triages, garde du Vaudreuil, 3 triages, garde du Béquet, 4 triages, et garde de Pont-de-l’Arche, etc.

Pendant la seconde moitié du XVIIe siècle, nous signalerons, parmi les officiers de la maîtrise, Nicolas Vallée, Bachelet de Lux, Pierre du Val, lieutenants particuliers ; Dorange, Cousin, et Sébastien Dubosc, lieutenants généraux ; le sieur de Maillé, contrôleur, Jean Routier et Louis Boursault, receveurs ; Pierre Marchand, Guyon du Hardel, sergents de la forêt.

Romain Boutry était, en 1730, garde général de la maîtrise des Eaux et Forêts de Pont-de-l’Arche ; Clude Pâris avait l’office de procureur du roi de la maîtrise ; Louis-Jean-Baptiste Lancelevé, occupait cette dernière fonction en 1776.

 

PONT-DE-L’ARCHE, ch.-l. de cant., arrond. de Louviers, sur la seine.- Sol : alluvions contemporaines, diluvium et craie blanche. – St. de ch. de fer de Paris à Rouen et de Gisors à Pont-de-l’Arche. – R. nat. n° 154 d’Orléans à Rouen, n° 182, de Mantes à Rouen. - R. dép. n° 12 de Bourgtheroulde à Gournay. – Ch. de gr. com. n° 4, de Pont-de-l’Arche au Neubourg. – Ch. d’int. com. n° 43 de Pont-de-l’Arche à N.D.-du-Vaudreuil. – 4 cont. 11,950 fr. en ppal. – Rec. ord. budg. 9,005 fr. – Surf. terr. 953 hect. – pop. 1,640 hab. - ? – Percep. – Rec. cont. ind. – Télég. – paroisse, cure, presbyt. – Ecole spéc. de 162 garç.- Ecole spéc. de 172 filles. – 2 maisons d’école. – 1 juge de paix avec son greffier. – 1 recev. d’enregist. – 1 notaire. – 2 huissiers. – 1 garde général des Eaux et Forêts. – Hospice de 22 lits. – Bur. de bienf. – 12 perm. de chasse. – 21 déb. de boisson. – Force pub., 1 brig. de gend. – 1 comp. de 43 sap.-pomp. – Dist. en kil. aux ch.-l. de dép. 33, d’arr. 9.

Dépendances : LE BON AIR, BONPORT, LA BORDE.

Agriculture : Céréales.

Industrie : 1 fabrique de chaussons.

Patentés : 112. 

 

Notes

Il était vicomte en 1646.

Notes Le Prévost, t. 2, p. 581, voir Lettres du cardinal.

Courrier de la Fronde.

Celui-ci fut condamné pour insulte à un fabricant de chandelle, à 1000 l. d’amende, réduite à 500 l..

Notes Le Prévost, t. 2, p. 587.

Léop. Delisle.

Ces offices avaient été créés par édit de 1639.

Armand Launay

Pont-de-l'Arche ma ville

http://pontdelarche.over-blog.com

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8 juillet 2011 5 08 /07 /juillet /2011 17:41

Naissance de la ville : raisons militaires 

Fort-en-869--Haywood- 

La ville de Pont-de-l’Arche est née après la construction de fortifications militaires bâties sur le territoire du village des Damps. Un pont de bois fut jeté sur la Seine, à partir de 862, et protégé par deux forts, de part et d'autre du fleuve. Le chantier de ces défenses, qui marqua le règne de Charles II, dit le Chauve, fut décidé et officialisé lors des plaids de Pîtres. Vers 873, le pont et les deux forts semblent avoir été achevés. Ils servirent notamment en 885 lors d'une offensive générale des "hommes du Nord", ayant pour but le siège de Paris. Le pont "de l'Arche" (c'est-à-dire "de la forteresse") servit à retarder l'avancée des Normands. Ceux-ci mirent quatre mois à gagner Paris depuis l'embouchure de la Seine. Cependant, les rois des Francs peinaient à mobiliser pleinement les troupes de leurs vassaux. Ainsi le fort de Pont-de-l'Arche a très certainement manqué d'hommes de garnison : Guillaume Caillou, moine qui tint les chroniques de Jumièges, se rappela un siècle et demi plus tard, et ce malgré de nombreuses imprécisions, que des renforts francs vinrent aux Damps pour renforcer la garnison du pont de l'Arche. En vain, donc.

On perd ensuite le fil de l'histoire durant le laps temps où s'articula le basculement de pouvoir des rois francs aux ducs de Normandie. Que devinrent le pont et la ville après 911, date de naissance de la Normandie ?

Toujours est-il que la paroisse de Pont-de-l'Arche apparaît dans une charte de Richard II, en 1020, qui accorde à l'abbaye de Jumièges de nombreux droits spirituels mais surtout financiers (notamment sur le trafic fluvial).

La ville semble s'être développée autour du pont, ouvrage nécessitant le montage des bateaux et offrant la possibilité de percevoir des droits de passage. Développement d’une place forte : l’enjeu de la lutte entre les rois d’Angleterre et de France.

 

Pont-de-l'Arche apparait ensuite bien plus clairement dans les archives lors des luttes entre Richard Coeur de Lion, duc de Normandie et roi d'Angleterre, et Philippe II Auguste, roi de France. Richard Cœur de Lion fit rénover le pont de la ville et donna les moyens nécessaires à la fondation de l'abbaye de Bonport (deux kilomètres de Pont-de-l'Arche). Dans les luttes entre les deux monarques, le château du Vaudreuil fut rasé ce qui, lorsque le roi de France reprit possession de la Normandie, facilita le choix de Pont-de-l'Arche comme chef lieu militaire local. En effet, Philippe Auguste fit de Pont-de-l’Arche son principal lieu de résidence en Normandie. Il dota la ville d'une prévôté et la fit fortifier par des remparts en pierre encore visibles de nos jours. Il en fit de même pour le fort de Limaie, situé de l’autre côté du pont, rive droite, dont il bloquait l’accès. Ce fort était doté d’une tour philipienne qui constituait un observatoire idéal sur la circulation fluviale et le montage des bateaux. Les atouts géographiques, alliés aux atouts militaires, firent que la ville devint un relai du pouvoir royal. 

 

Rôle de Pont-de-l’Arche dans la maitrise territoriale et la police intérieure

L’assise militaire de la ville présentait de nombreux avantages, tant pour la maitrise territoriale face à l’éventuels envahisseurs que pour la police intérieure au royaume. Pont-de-l’Arche permettait la maitrise de la circulation fluviale et, donc, l’approvisionnement de Rouen, ville qui pouvait tomber entre des mains ennemies. C’est pourquoi notre cité fut un enjeu lors des combats qui opposèrent les rois d’Angleterre aux rois de France durant la guerre de Cent ans. Ainsi Henri V, roi d’Angleterre, se rendit maitre de Pont-de-l’Arche en 1418. La ville connut ainsi une occupation anglaise jusqu’en 1449. En 1346, Édouard III ne put prendre Pont-de-l’Arche et poursuivit sa chevauchée vers Mantes. Qui plus est, la ville offrait une base arrière idéale en vue d’une attaque de la capitale haut Normande :

- en 1481 Louis XI établit un vaste camp dans la vallée située entre Pont-de-l’Arche et Pont-Saint-Pierre. Ce camp aurait accueillit une armée de près de trente mille hommes afin de reprendre Rouen puis toute la Normandie. C’est ici que furent créées les célèbres « bandes de Picardie », ancêtres de l’infanterie française.

- en 1589, les troupes d’Henri IV, qui assiégeaient Rouen, étaient ravitaillées depuis Pont-de-l’Arche. Précisons que le gouverneur de la ville, Leblanc du Rollet avait, parmi les premiers, ouvert les portes de la ville à Henri IV, roi contesté. La tradition orale narre que ce monarque avait gratifié, en remerciement, les armes de la ville des trois fleurs de lys royales. Cependnat, la ville étant un plein fief royal, ces lys ne sont pas surprenant. La ville blasonne depuis : de sable au pont d’argent maçonné de sable, au chef cousu d’azur chargé de trois fleurs de lys d’or.

Bastille excentrée de Rouen, Pont-de-l’Arche était une base de repli en cas de révolte du peuple normand. C’était une place de sûreté dans la mesure où il n’y avait pas assez d’habitants ici pour impulser une révolte dépassant les forces de police locales. De plus, maitriser la ville ne suffisait pas : il fallait encore prendre d’assaut le fort de Limaie, de l’autre côté de la Seine. Pont-de-l’Arche était donc, pour des raisons de police intérieure, de maitrise du territoire en cas de guerre, une place stratégique :

- c’est ainsi que des protestants rouennais assiégèrent la ville, en 1562, avec 6 pièces d’artillerie en espérant y faire un butin. Ils s’en prirent directement au pouvoir royal, mais en vain car la ville était restée fidèlement catholique.

- en 1650, la Fronde renversa l’utilité des fortifications de la ville : Le duc de Longueville utilisa la garnison et le château contre le pouvoir royal. Le comte d’Harcourt, qui protégeait le voyage du monarque en Normandie, reçut l’ordre d’investir la place. Il vint camper auprès de ses murs avec l’aide des habitants qui avaient pointé trois canons contre le château, de l’autre côté de la Seine. Le duc de Longueville se servit de cette place forte comme un argument supplémentaire pour négocier la paix avec le roi. Les remparts de Pont-de-l’Arche étaient devenus une arme pour d’éventuels insurgés. Le parlement de Normandie et le peuple de Rouen demandèrent à plusieurs reprises leur démantèlement. Cependant, les nobles qui percevaient des droits sur la ville négocièrent le maintien des fortifications. Elles ne tombèrent en désuétude qu’à la fin du XVIIIe siècle.

 

 

Pont-de-l’Arche et la convoitise des privilèges royaux sous l’Ancien régime

Les ambitions n’étaient pas rares qui se tournaient vers Pont-de-l’Arche. La ville comptait de nombreuses charges qui attiraient les convoitises :

- la charge de gouverneur de la ville (police militaire locale) : les plus grands nobles qui obtinrent du roi les droits de gouverneur de la ville furent Concini, maréchal d’Ancre et allié de Marie de Médicis, Albert de Luynes, Jean-Baptiste d’Ornano, Richelieu.

- quatre tribunaux : le tribunal de première instance (le bailliage), la perception des tailles (le tabellionnage), le grenier à sel (sa vente était un monopole d’État) et l’administration des eaux et forêts. Ces tribunaux attirèrent de nombreux officiers royaux dans la ville ;

- les droits mineurs (droits de passage sur le pont, droit de halle, droit d’octroi…).

Il résultait de ces charges un déséquilibre : outre une fabrique de drap qui ne dura qu’un temps, la ville de Pont-de-l’Arche ne connaissait aucune industrie qui nourrît les 1700 habitants que comptait la cité à la veille de la Révolution française. Elle n’en était pas moins le chef-lieu de l’administration locale.

 

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La Révolution française et l’Empire ou la fin des privilèges

La Révolution française remit les pendules l’heure en faisant de Louviers le chef-lieu de l’administration locale : le rôle militaire de Pont-de-l’Arche avait cédé depuis longtemps le pas aux gains issus de l’industrie manufacturière de Louviers, ville bien plus peuplée. En 1790, Elbeuf ne fut pas compris dans le nouveau département de l’Eure à cause du refus de Louviers de cohabiter avec son concurrent drapier. Ces deux villes locales purent donc toutes les deux devenir des chef-lieu de circonscription. Hormis un juge de paix et une municipalité, Pont-de-l’Arche perdit toute fonction administrative. Durant la Révolution, les nouvelles municipalités archépontaines connurent les mêmes disputes que celles qui déchiraient les nobles d’avant la révolution. Néanmoins, celles-ci étaient publiques. Après 1792, les républicains avancés prirent le dessus de la politique locale. Alexandre de la Fleurière fut maire de la ville. Il fut chassé par la réaction thermidorienne de 1795. Les principaux problèmes que connut la ville durant cette période concernent les altercations entre les régiments de l’armée révolutionnaire et les habitants les plus attachés au culte catholique. Ils concernent aussi, et surtout, la famine. Celle-ci était aussi atroce que partout ailleurs à cela près que des habitants de la ville, depuis de longs siècles, montaient les bateaux sous le pont. Ils tiraient donc les bateaux de blé destinés à la population de Paris mais le ventre vide ! sans même pouvoir manger de quoi refaire leurs forces. C’est ainsi qu’ils arrêtèrent de travailler et qu’ils prirent du blé dont étaient chargés les bateaux… avant que l’armée ne les réprime. Napoléon Bonaparte, qui passa deux fois par Pont-de-l’Arche, comprit ce danger pour la police intérieure et fit bâtir une écluse, inaugurée en 1813. Celle-ci permettait de se dispenser de la main d’œuvre locale tout en faisant acheminer le pain qui apaisait le peuple et évitait ainsi d’éventuels mouvements insurrectionnels parisiens. Rappelons que le peuple en armes avait fait changer le cours de la Révolution à plusieurs reprises déjà (la déchéance du roi, la répression des girondins…). Le début du XIXe siècle fut une période de misère pour la ville. Il n’y a guère d’événements si ce n’est l’occupation prussienne en 1815. Notons la présence d’une loge franc-maçonne et la création de la gare Alizay-Pont-de-l’Arche en 1843.

 

 

La révolution industrielle : l’industrie du chausson et de la chaussure

La révolution industrielle a touché le pays : l’industrie du chausson s’est développée qui a apporté un travail très faiblement rémunéré aux habitants de la proche région. Les chaussons, d’abord réalisés dans les foyers des ouvriers, furent ensuite fabriqués dans des usines construites dans les ruelles médiévales de la ville à partir de la moitié du XIXe siècle. Cette industrie se propagea et, dans l’entre deux guerres, une vingtaine d’usines existaient qui employaient plusieurs milliers de personnes. La fabrique du chausson, puis de la chaussure après 1900, n’ap