Dans la rue des Soupirs, au fond d’une propriété où sont loués plusieurs garages, se trouve un mur en terre, type de construction aussi appelée mur en bauge. La bauge est composée de terre, l’argile en l’occurrence, et divers matériaux dont un soubassement en moellons calcaires et quelques os…
En effet, des os font partie de ce petit élément du patrimoine rural et agricole, mitoyen avec la cour d’école, qui est à mettre en relation avec un ancien corps de ferme du XIXe siècle qui va disparaitre dans les semaines à venir afin de laisser place à la résidence Lucie-et-Raymond-Aubrac.
Dans ce mur, qui va survivre au corps de ferme, se trouvent deux rangées d’os de diverses espèces animales. Cette disposition ordonnée démontre qu’il s’agit d’un choix délibéré.
A quoi pouvaient bien servir ces os qui dépassent de quelques centimètres du mur ?
On pourrait penser qu’ils servaient à consolider l’ouvrage. Mais la relative rareté des os dans ce type de murs démontre que ce n’est pas une bonne piste. De plus, pourquoi les laisser dépasser du mur ?
Cette volonté de les laisser apparaitre est une piste que nous relions à un article traitant des écorçoirs en os [1]. L’auteur, un certain Doré-Delente, de Dreux, avançait en 1892 avoir vu "… un vieux bûcheron qui prétend que les os que l'on trouve dans les vieux murs en bauge, où ils ont été mis comme supports de treillage, sont de beaucoup préférables aux frais ; probablement parce qu'ils sont durcis par l'âge et aussi parce qu'ils sont désinfectés."
Cette thèse de support de treillage, maintenant des végétaux grimpants, est d’ailleurs reprise dans divers forums sur le Net [2] qui les présentent comme supports de rosiers ou de vignes [3]: « Cette pratique, en usage au nord de la Loire depuis la Bretagne jusqu'à la Suisse romande, permettait une économie en chevilles de fer, dont le cout était élevé [4].
En effet, l’os est un matériau résistant qui, à la différence du bois ou du métal, n’affecte pas le mur en s’érodant. En somme, il est peu couteux et préserve une construction réalisée avec un matériau friable : la bauge !
Notes
[1] Doré-Delente, "Ecorçoirs en os", Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, IV° Série. Tome 3, 1892. pages 198-199. url : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0301-8644_1892_num_3_1_3971. Consulté le 21 novembre 2012
[2] Academia celtica,
[3] Mur à os de moutons, Jouy-le-Moutier : http://fr.topic-topos.com/mur-a-os-de-mouton-jouy-le-moutier
Armand Launay
Pont-de-l'Arche ma ville