Sur la route de Rouen, après le pont, les plus observateurs auront remarqué une cheminée en brique. Située au n° 12 de la rue du Canal, à Igoville, cette propriété privée témoigne de l’existence de l’usine électrique de Pont-de-l’Arche…
Fondée par Adrien Gascon en 1894, la Société normande d’électricité alimenta Pont-de-l’Arche et sa proche région en électricité depuis ses locaux de la rive droite de la Seine. Il semble qu’Adrien Gascon fut aidé par le marquis de Cairon, maire d’Alizay qui habitait le manoir de la Motte (actuelle mairie). L’expansion de la première usine électrique locale nécessita la création d’un second local plus vaste et lumineux (voir notre photo) et le premier bâtiment en brique fut transformé depuis en style « vieux normand ».
C’est Marcel Gaubert qui reprit cette usine en 1909. Il commanda aussitôt un nouveau moteur à gaz suisse qui arriva durant les inondations de février 1910 où 20 cm d’eaux étaient entrés dans le local (voir plaque). Mobilisé durant la Grande guerre, M. Gaubert fut remplacé par son contremaitre, M. Hémard. Marcel Gaubert rentra du front et se maria en 1919, quelques mois avant la naissance de son fils Jacques Lachner-Gaubert. En ce temps, la Société normande d’électricité s’arrêtait de produire durant la nuit. Elle achetait donc du courant à la Société andelysienne d’électricité (SAE) et le transformait en courant alternatif.
La centrale de Pont-de-l’Arche compta jusqu’à sept moteurs dont deux de marque Caterpillar. Elle fournissait la ville de Pont-de-l'Arche et notamment l'industrie de la chaussure hormis les établissements de Paul Nion et ses fils de Georges Prieur, faisant leur propre courant, et MARCO, se fournissant à la SAE. Les habitants de Pont-de-l’Arche n’avaient presque pas d’électricité quand les usines tournaient. Certains se souviennent d’avoir « à peine un lumignon » qui éclairait la cuisine le soir. Il fallait attendre la fermeture des usines pour y voir clair ! Jacques, le fils de Marcel, apprit son métier à l’école professionnelle de Rouen (Blaise-Pascal). Il travailla à l’usine de son père à partir de 1938.
Quatre personnes travaillaient alors pour Marcel Gaubert en 1939 quand éclata la guerre. Ce dernier fut mobilisé et emprisonné 5 ans en Autriche. La centrale fut affectée par la guerre et dut racheter le courant à la SAE. A la Libération, l’énergie électrique fut nationalisée. L’usine de Pont-de-l’Arche ferma ses portes. Jacques Lachner-Gaubert intégra le personnel d’EDF en 1948. Il travailla à Louviers jusqu’en 1975.
Aujourd’hui, dans ses locaux au charme d’antan, Jacques témoigne de la course folle qu’a connue notre société plus d’un siècle, de révolution technique en révolution technique. Il nous a permis de lever le mystère sur ce bâtiment qui a compté dans l’histoire locale en nous l’en remercions vivement !
Publié initialement dans Pont-de-l’Arche magazine n° 13 (automne 2011)
Jacques Lachner-Gaubert, témoin fidèle de la vie de l’ancienne usine électrique de Pont-de-l’Arche.
Sources
Registre des délibérations du Conseil municipal de Pont-de-l’Arche
Divers courriers d’époque
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